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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 32.djvu/509

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DE L’UNION COMMERCIALE.

Le commerce de la Belgique est encore moins à redouter pour les fils et tissus de coton que pour les tissus de laine. L’industrie cotonnière est peu avancée dans ce pays ; elle travaille sur une petite échelle[1], ne file pas au-dessus du numéro 40, fabrique exclusivement des tissus communs, et, loin de pouvoir prétendre à disputer les marchés extérieurs, laisse envahir son propre marché par les produits étrangers.

Dans les exportations de la Belgique, les tissus de coton sont comptés pour environ 5 millions de francs ; encore M. Briavoine est-il d’avis que l’on doit réduire ces évaluations de moitié. Les tissus exportés sont généralement de peu de valeur et se dirigent vers la Hollande où ils entrent, par une suite des habitudes prises avant 1830, dans les approvisionnemens coloniaux.

Les tableaux de la douane belge n’évaluent pas à plus de 5 millions et 1/2 les tissus de coton importés du dehors ; la part de la France dans cette importation est fixée à 2 millions, et celle de l’Angleterre est à 3 ou 400,000 fr. de plus. De pareilles données sont en contradiction avec les tableaux publiés en Angleterre et en France, qui évaluent, pour chacune de ces puissances, à plus de 5 millions de francs les tissus expédiés en Belgique. Mais la fraude envahit un espace bien autrement étendu que celui qu’indique cette différence entre les évaluations faites aux points de départ et celles du point d’arrivée. Un fabricant de Gand, M. Suret, entendu dans l’enquête de 1840, porte à 20 millions de francs les quantités que la contrebande introduit dans le pays.

On arrive à la même conclusion par d’autres calculs. « En France, dit M. Coppens, autre fabricant de Gand, la consommation du coton s’élève annuellement à 20 francs par individu. Supposons qu’elle ne soit chez nous que de 17 francs, quoique nos ouvriers soient mieux vêtus que les ouvriers français ; nous avons une population de 4 millions d’habitans, la consommation générale du coton s’élèverait donc à 68 millions de francs. En réunissant tous les articles fabriqués dans le pays, nous n’arriverions qu’à une production totale de 44 à 45 millions. » M. Briavoine n’évalue la production cotonnière en Belgique qu’à 42 millions, ce qui donnerait 10 francs par individu, ou la moitié de ce que la France consomme. On voit qu’il reste à la contrebande une grande marge ; elle est d’autant plus facile qu’elle s’exerce sur les tissus fins et de prix. « Le pays prête trop à la fraude, » dit encore M. Coppens.

Pour comparer, d’une manière plus exacte, l’industrie cotonnière en France avec la production similaire en Belgique, prenons les importations des cotons bruts. En 1840, la France a importé 85 millions de kil., représentant une valeur de 151 millions de francs. L’importation des cotons en laine la plus considérable en Belgique, est celle de l’année 1841, qui s’est élevée au-dessus de 7 millions de kilogrammes et qui figure dans les comptes officiels pour

  1. « La filature la plus considérable en Belgique ne dépasse pas 15,000 broches. » (Briavoine, De l’industrie en Belgique.)