Mme Morsy. — Je ne savais pas que la musique eût des mystères dont il ne fût pas séant de parler devant des femmes.
M. Morsy. — J’ai à parler de musique, il est vrai, mais aussi de quelques autres choses qui intéressent ce jeune homme.
Mme Morsy. — Écoute, Morsy, tu me caches quelque chose ; depuis ce matin, tu es dans une agitation étrange !
M. Morsy. — Tu trouves ?
Mme Morsy. — J’en suis sûre.
M. Morsy. — Eh bien ! tu as raison, j’ai bien du chagrin ! Tu me parlais l’autre jour des Cotel ?
Mme Morsy. — Oui ; eh bien ?
M. Morsy. — Eh bien ! il faut garder pour nous la pitié qu’ils nous inspiraient.
Mme Morsy. — Comment ! que veux-tu dire ? mais parle donc !
M. Morsy. — Cette nuit, le jardinier a entendu causer dans le jardin ; il s’est posté à la petite porte du bois, et là il a été renversé par un homme qui fuyait ; il a reconnu Paul Seeburg.
Mme Morsy. — Après ?
M. Morsy. — Après, il n’a pas trouvé la personne avec laquelle il causait.
Mme Morsy. — Et tu penses ?
M. Morsy. — Je pense que Paul causait avec Cornélie.
Mme Morsy. — Et que veux-tu faire ?
M. Morsy. — Je voulais d’abord parler à Cornélie.
Mme Morsy. — Laisse-moi plutôt lui parler.
M. Morsy. — Ne t’en avise pas ! ce serait, si je ne me trompe, éveiller dans sa tête de dangereuses idées. Je parlerai à Seeburg, il y a moins de risque à se tromper, quoique je croie être sûr ; si par un hasard inoui je me trompais, il croirait que je l’accuse d’avoir cherché à s’approcher de Cornélie, il ne saurait pas que nous avons accusé notre fille de complicité avec lui.
Mme Morsy. — Mais enfin, que vas-tu lui dire ?
M. Morsy. — Laisse-moi faire, je saurai bien la vérité.
Mme Morsy. — Vous autres hommes, vous ne valez rien pour cela ; je suis sûre que tu gâteras tout dès le début. Voyons, que vas-tu lui dire ?
M. Morsy. — Je lui dirai sévèrement : Monsieur, asseyez-vous et parlez-moi franchement.
Mme Morsy. — Pourquoi prendras-tu un air sévère ? et pourquoi l’appelleras-tu monsieur ?