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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 1.djvu/163

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REVUE. — CHRONIQUE.

Eh quoi ! vous pourrez appeler au conseil privé messieurs tels ou tels, et en supposant qu’il n’eut pas convenu à M. Royer-Collard de se laisser nommer président de la chambre, vous ne pourriez pas proposer au roi d’honorer son conseil de ce grand nom, de l’éclairer de cette vive lumière ! Eh quoi ! une crise politique appellerait autour du trône tous les hommes éminens, influens, attachés à la dynastie, sans distinction de parti, et le conseil privé ne pourrait pas s’ouvrir devant M. de Lamartine et M. Barrot ! — Une nouvelle ordonnance modifierait la première, et leur ouvrirait les portes du conseil. — Sans doute et fort heureusement ; mais alors pourquoi se renfermer dans les catégories ? Pour se donner le plaisir d’en sortir ? — Pour échapper, dit-on, aux sollicitations. — Faible rempart contre les importunités des hommes nuls et vaniteux ! Si vous ne trouvez pas en vous-mêmes le courage de repousser hautement leurs folles prétentions, ils sauront bien vous arracher de nouvelles ordonnances. Même à ce point de vue, les catégories sont inutiles. Elles sont plus qu’inutiles dans l’intérêt de la couronne. Pourquoi se donner des entraves ? Pourquoi restreindre sa prérogative là où elle a droit à une pleine liberté ? Si on veut un conseil privé permanent et connu, il faut qu’à chaque nouveau ministère, ou mieux encore que chaque année, une ordonnance royale publie la liste des hommes politiques que le roi aura honorés de son choix. Il est de l’essence de notre gouvernement que la composition du conseil privé puisse être modifiée selon le cours des évènemens et l’ensemble des circonstances.

On dit que le ministère se propose de présenter sans retard aux chambres les lois des sucres, des fonds secrets, du recrutement, des prisons, de l’enseignement secondaire, de la juridiction militaire, et quelques autres. Nous ne voulons pas nous occuper de ces matières sur de simples bruits : attendons les projets.

Van Halen a été révoqué. Le général Seoane lui succède dans le commandement général de la Catalogne. Le chef politique de Barcelone doit aussi être changé. Justice est rendue non-seulement en France, mais en Espagne, mais en Europe, au consul français, car nous ne tenons aucun compte des stupides réclamations de quelques folliculaires espagnols ; ils ne méritent pas l’honneur d’une mention. Les collègues de M. Lesseps, le consul d’Angleterre y compris, lui ont offert un banquet comme témoignage de leur estime et de leur reconnaissance. Le roi de Sardaigne l’a décoré. Ce qui nous a plu davantage encore, c’est que notre gouvernement a répondu aux injustes attaques dont M. Lesseps et M. Gatier avaient été l’objet, par leur promotion dans l’ordre de la Légion-d’Honneur. Ce qui nous a le plus frappés dans cette déplorable affaire, c’est la crédulité des Anglais et surtout de leurs agens à l’étranger, même de ceux qui sont le plus haut placés. On les a fort accusés de perfidie, de parti pris, de haine aveugle contre la France, comme s’ils avaient inventé les bruits, fabriqué les fausses nouvelles qu’ils se plaisaient à répandre en Espagne et ailleurs. Il n’en est rien, nous en sommes convaincus. Ces bruits,