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l’intérêt de son capital pendant les trois autres années, soit à raison de 5 pour 100 sur 75 millions, 11 millions 250,000 francs.

Mais le bénéfice qui en résulterait pour le pays serait bien autrement sensible. Nous y gagnerions non-seulement tout ce que l’état aurait dépensé au-dessus des 115,000 francs par kilomètre, mais encore, mais surtout de jouir trois années plus tôt de la grande voie qui doit rapprocher Londres et Bruxelles de Paris. Cet avantage est de premier ordre, dans un moment où la France reste encore, par rapport aux chemins de fer, en arrière de tous les peuples civilisés. Ajoutons que l’on entrerait ainsi en possession de la plus-value que l’exploitation du chemin de fer doit infailliblement donner au revenu public, et qui ne peut manquer d’excéder l’intérêt du capital dépensé par l’état.

Quand nous disons que cette plus-value excédera l’intérêt des sommes dépensées, nous nous arrêtons à l’évaluation la plus modérée. Ce qui est probable en effet, c’est que le revenu supplémentaire qui résultera pour l’état de l’exécution des chemins de fer remboursera, en quatre ou cinq ans, le capital de construction, qui se trouvera n’avoir constitué ainsi qu’une avance pour le trésor. « Le canal du Languedoc, dit Dupont de Nemours, voiture un commerce de 50 millions de fr. par année ; il en est résulté par année 5 millions de bénéfices pour les marchands ; les propriétaires de terres qui, sans lui, n’auraient pas de débouchés, ou n’en auraient qu’un mauvais, reçoivent par le service du canal une augmentation de 20 millions de revenu. L’état a touché de ces 20 millions, par les tailles et vingtièmes ou impôts équivalens, au moins 5 millions de francs tous les ans et 500 millions en un siècle. » Prenons un exemple plus voisin de notre temps. D’où pense-t-on que vienne cet accroissement colossal de l’impôt indirect qui donne aujourd’hui 200 millions de plus qu’il y a dix ans, si ce n’est de la plus-value que les routes nouvelles ont donnée à l’industrie et à la propriété ?

La compagnie avait proposé une autre modification qui se recommande d’elle-même à toute la sollicitude des chambres. Le traité qu’elle a signé lui accorde quarante années de jouissance ; mais, à l’expiration de ce bail, l’état doit lui rembourser, à dire d’experts le prix de la voie de fer et la valeur du matériel. C’est là une obligation onéreuse et qui met l’état à la discrétion de la compagnie. En effet, si l’état refuse de renouveler le bail, il peut avoir 50 ou 60 millions à débourser ; s’il consent au contraire à une novation du contrat, il n’en