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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

effet tous les complots formés par ces Slaves, dans le but de leur émancipation, et il dévoilait ces complots à la police turque en même temps qu’aux agens russes, s’assurant ainsi un appui dans les deux cours rivales. Le nouveau visir de Bosnie, Daoud, qui avait espéré calmer les Bosniaques bannis des champs paternels en leur témoignant quelque sympathie, ne réussit qu’à leur rendre, par cet appui officiel, le courage de la vengeance. Dépouillés par les chrétiens libres, ils se jetèrent avec fureur sur les chrétiens raïas. Les frères et enfans des capitaines persécutés les années précédentes prirent hautement la défense de ces maraudeurs musulmans, et les raïas de Bosnie se virent soumis à mille tortures. Vainement ils invoquèrent Miloch et le sultan, qui, ayant causé par leurs actes tyranniques cette persécution nouvelle, auraient dû se hâter d’y mettre un terme : ni Mahmoud ni Miloch ne s’inquiétaient de leurs victimes.

À la fin de 1834, les raïas, poussés à bout, se soulevèrent contre leurs spahis, et mirent à leur tête un pope nommé Iovitsa. Aussitôt Miloch leur fit exprimer son mécontentement ; quelques bandes de iounaks étant allés de Serbie au secours de leurs frères bosniaques, le prince les rappela et les punit sévèrement. L’insurrection ainsi contrariée fut vaincue ; Iovitsa lui-même, après s’être long-temps défendu dans les forêts, dut passer dans la principauté, où Miloch ne tarda pas à le faire incarcérer. Du fond de son cachot de Belgrad, l’infatigable patriote bosniaque ourdit une nouvelle conjuration, et au printemps de 1835, deux mille raïas, sous la conduite du knèze Pavel, recommencèrent la lutte dans les vallées de la Drina. Ces malheureux schismatiques virent alors pour la première fois les missionnaires catholiques de Bosnie s’intéresser à leurs souffrances, et leur envoyer comme auxiliaires l’élite de leurs ouailles. Mais catholiques et schismatiques ne se battaient qu’avec des instrumens de labourage : comment auraient-ils pu dompter ces terribles spahis dont la vie tout entière n’est qu’une étude passionnée des exercices militaires ? ils furent encore vaincus, et le malheureux Iovitsa se vit livré par Miloch, comme l’auteur principal de ces troubles, au pacha de Vidin ; ce ne fut que sur un ordre exprès du sultan que le captif recouvra enfin sa liberté.

Le visir de Bosnie, Daoud, n’était pas d’un caractère assez ferme pour faire triompher dans ce pays, même avec l’appui de Miloch, les réformes de Mahmoud. Vers la fin de 1835, le divan lui donna donc pour successeur un Turc d’Anatolie, l’énergique Vedchi, qui était alors pacha de Belgrad. Les courtisans de Miloch escortèrent Vedchi