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« Dans cette convention, disaient-ils, les droits de la Grande-Bretagne ont été enregistrés et définis : ils embrassent le droit de naviguer dans toute l’étendue de la mer Pacifique, de s’établir sur tous les points du littoral, et de faire le commerce avec les naturels et les habitans. Ces droits ont toujours été exercés sans contestation depuis la date de cette convention, c’est-à-dire depuis 1790, et c’est sous cette convention que des intérêts considérables pour l’Angleterre ont pris naissance et se sont développés dans cette partie du monde. »

Le capitaine Cook avait relâché, on le sait, dans le golfe de Nootka. Durant son court séjour, il avait pu apprécier tous les avantages que cette contrée offrait au commerce des fourrures et du ginseng, deux articles fort demandés sur les marchés de la Chine. Sur ce qu’il en avait rapporté, une société de négocians de Londres entreprit, en 1785, d’établir un comptoir dans ce golfe. Deux navires furent d’abord expédiés, et les profits énormes des armateurs les engagèrent à renvoyer sans retard dans les mêmes mers deux autres navires, sous le commandement des capitaines Douglas et Meares. Ce dernier acheta sur la côte du golfe de Nootka, de la tribu indienne qui l’habitait, l’autorisation d’élever un bâtiment qu’il entoura d’une palissade, et sur lequel il planta le pavillon britannique. De nouveaux navires apportèrent des ouvriers d’Europe et environ soixante-dix Chinois, avec tout ce qu’il fallait pour fonder un établissement commercial. Les Indiens s’empressèrent d’apporter des fourrures et des pelleteries, et toutes choses prospéraient, lorsqu’un jour deux vaisseaux de guerre espagnols, partis d’un port du Mexique, entrèrent dans le golfe de Nootka, saisirent les navires anglais au nom du roi d’Espagne, mirent aux fers les officiers et les équipages, prirent possession des bâtimens élevés sur la côte, et remplacèrent le pavillon britannique par celui d’Espagne, sous le prétexte que toute la côte occidentale du continent américain, depuis le cap Horn jusqu’au 60e degré de latitude nord, appartenait à sa majesté catholique.

La nouvelle de cet acte de domination, exercé au milieu d’une paix profonde, fit une grande sensation en Angleterre. L’ambassadeur d’Espagne à Londres, le marquis del Campo, s’empressa d’offrir la restitution des navires saisis, pourvu que le gouvernement anglais reconnût le droit de souveraineté réclamé par son maître sur toute la côte nord-ouest de l’Amérique. Cette satisfaction ne pouvait suffire à la Grande-Bretagne, blessée dans son honneur et dans ses intérêts. Aussi Le chargé des affaires de l’Angleterre auprès de la cour de Ma-