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LETTRES SUR LE CLERGÉ.

quaient à prêcher l’oubli des injures, il en résulta que les gens qu’on avait battus à outrance, et qu’on forçait à se défendre, eurent l’air d’agresseurs. Cependant cette espèce de paix de l’église ne fut pas de longue durée. Ceux qui demandent à tout propos la liberté de l’enseignement voulurent étouffer les libres paroles que des hommes de talent et de cœur prononçaient au collége de France : se voyant en trop petit nombre pour en imposer à un immense auditoire, ils battirent en retraite, et les violences recommencèrent de plus belle dans les journaux. L’Ami de la Religion, l’Univers, la Gazette du Midi, reprirent le cours de leurs invectives habituelles ; M. l’évêque de Chartres recommença la série de ses mandemens et de ses lettres, et, comme si tout cela était insuffisant, la congrégation vient de faire paraître à Lyon un second pamphlet beaucoup plus virulent que le premier. Ce sont probablement les lauriers cueillis par M. Desgarets qui ont porté l’auteur de ce nouvel écrit à attaquer avec une ardeur sans égale tous ceux qui ne fléchissent pas le genou devant les jésuites. Pour montrer l’excès de l’aveuglement dans lequel l’auteur de ce libelle est tombé, il suffira de dire qu’il poursuit de ses injures un homme que la France entière a entouré de sa vénération, et qui possède la plus solide piété. En s’attaquant à M. Royer-Collard, qu’on avait toujours respecté, ce nouvel athlète a prouvé qu’il voulait se faire distinguer dans son parti par l’étrangeté et la bizarrerie de ses emportemens.

Ce n’est pas seulement par leurs actes que les partisans de la congrégation se font reconnaître ; se mettant en révolte ouverte contre l’Évangile, ils foulent aux pieds la charité, et, au lieu de reconnaître leurs erreurs, ils prêchent la persécution, ils veulent légitimer l’emploi de l’injure. Il faut lire à cet égard l’Univers du 25 mai dernier, où se trouvent à la fois un grand article sur le zèle et la modération, et une lettre du respectable auteur du Monopole universitaire. Dans l’article, les rédacteurs de l’Univers répondent à leurs amis, « qui s’accrochent à leurs vêtemens pour les retenir, criant qu’ils les compromettent, » que le zèle doit tout excuser. À ceux qui leur recommandent la modération, ils conseillent le zèle, et ils répètent le serment prêté par les chevaliers du Temple, de combattre à outrance les infidèles : exemple admirablement choisi pour des gens qui font profession d’humilité et de foi ; car on sait bien que les templiers furent des modèles de piété, de charité, et de toutes les vertus chrétiennes. Aussi, animé par le souvenir de ces illustres guerriers,