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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 3.djvu/26

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REVUE DES DEUX MONDES.

de soleil dans le regard, non pas tout-à-fait avec le sourcil trop gris d’un Johnson ; ne jamais substituer l’humeur au coloris ; voir enfin, s’il est possible, les œuvres et les hommes sous le jour où nous les offre ce moment présent, déjà prolongé. La carrière des écrivains dont la naissance date environ de celle du siècle se prête tout-à-fait à ce second point de vue. L’espèce de halte qui dure depuis plusieurs années met naturellement un intervalle, une distance commode, entre les premiers groupes et ce que l’avenir réserve. L’époque a l’air de se trancher par son milieu ; on peut embrasser la marche de la première moitié avec quelque certitude. À cet âge qu’accuse le chiffre moyen du cadran commun, artistes et poètes, on est entré généralement dans la manière définitive. Le temps des essais, des escarmouches brillantes, est dès long-temps passé ; on a déjà dû livrer sa grande bataille. Combien en est-il qui l’aient gagnée ? Combien même qui aient osé et pu se recueillir assez pour la livrer sérieusement ? Ce sont des questions qui ne sauraient se décider avec quelque fruit et avec tout leur piquant qu’en reprenant un à un les noms les plus autorisés de nos jours. Ce projet d’une série nouvelle des poètes et romanciers (seconde phase) est une veine féconde : nous-même ou d’autres, plus tard, la perceront.


Sainte-Beuve.