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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 3.djvu/671

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POLITIQUE COMMERCIALE DE L’ANGLETERRE.

laine de plusieurs couleurs ; enfin du tarif américain imposant sur les manufactures anglaises des droits qui varient de 30 à 40 et 50 pour 100, et dont l’effet immédiat fut d’arrêter, l’automne dernier, dans les ports d’Angleterre, des chargemens considérables de tissus de coton qui allaient être expédiés pour les États-Unis.

Sir Robert Peel se flattait du moins de regagner par des traités de commerce le terrain que les tarifs hostiles enlevaient à l’industrie britannique. En vue des négociations commerciales, il avait excepté de l’abaissement général des droits plusieurs articles manufacturés ou de consommation de luxe, les soieries et les vins par exemple, et il annonçait qu’il ne les dégrèverait qu’en obtenant des pays intéressés des concessions équivalentes en faveur des marchandises anglaises. Les intérêts industriels attendaient avec anxiété l’issue de ces négociations, dont le succès pouvait seul faire supporter patiemment les protections exorbitantes maintenues encore à leurs dépens en faveur des intérêts agricoles et coloniaux ; mais on sait qu’en matière de traités de commerce, la politique de sir Robert Peel a été sur tous les points mise en déroute. Le parti industriel a redoublé alors d’exigences, il a repris l’argument déjà formulé dans la pétition de 1820 : « L’Angleterre doit abandonner le système restrictif, alors même que les autres états s’opiniâtreraient à le maintenir contre elle ; car, même dans cette hypothèse, ce système ne porterait pas un moins grave préjudice aux capitaux et à l’industrie britanniques. » Ce parti ne voit plus dans les traités de commerce qu’un vain leurre dont il ne veut pas se laisser plus long-temps amuser ; tel est le sens de la résolution qu’il a proposée dernièrement[1] dans la chambre des communes par l’organe de M. Ricardo, résolution qui demandait « qu’il fût présenté à sa majesté une humble adresse lui exprimant respectueusement que, suivant l’opinion de la chambre, il ne convenait pas que les réductions sur les droits d’importation fussent ajournées dans le dessein d’en faire la base de négociations commerciales avec les autres pays. »

La motion de M. Ricardo a été rejetée par une majorité de 74 voix, mais elle a soulevé un débat dont les enseignemens, nous l’espérons, ne seront pas perdus pour les gouvernemens européens. Les orateurs qui l’ont combattue, M. Gladstone, lord Sandon, M. d’Israeli, sir Robert Peel, ont fait, aussi bien que lord Howick et lord John Rus-

  1. Séance du 25 avril de cette année.