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REVUE. — CHRONIQUE.

rerait, à ce qu’il paraît, voir nos bateaux se perdre ou couler bas. Il est superflu d’ajouter qu’une pareille observation n’a pas eu de suite : le traité sera sans doute approuvé.

Un autre bill de quelque importance est maintenant discuté dans le parlement anglais : nous voulons parler du bill pour faciliter l’exportation des machines. On comprend que toute entrave à cette branche, aujourd’hui si importante, du commerce international est une cause de dommage pour l’Angleterre. Ajoutons qu’en général le système prohibitif perd tous les jours du terrain de l’autre côté de la Manche. Le jour viendra où il périra de ses propres excès. C’est le sort qui l’attend dans tous les pays qui l’ont adopté. Le système prohibitif, par la nature même des choses, appelle les représailles. Il est puéril d’imaginer que nos voisins continueront leur commerce avec nous, qu’ils viendront acheter nos produits lorsque nous repousserons impitoyablement les leurs. C’est tout simplement vouloir l’impossible. Le système prohibitif tend sans cesse à isoler chaque nation, et à faire en sorte que chacun trouve, coûte que coûte, les moyens de se suffire à lui-même. C’est ainsi que la production artificielle s’établissant partout à côté de la production naturelle, les producteurs qui dépassent par leur activité les besoins de leur pays rencontrent partout des barrières impossibles à franchir. Ce système tant vanté n’est qu’une grande folie qui coûte cher à tout le monde, mais dont la responsabilité morale pèse sur les premiers inventeurs. Nos neveux, pour qui les douanes ne seront plus qu’un moyen d’impôt et un moyen qui leur donnera de très gros revenus, s’étonneront sans doute de l’aveuglement de leurs ancêtres ; mais l’égoïsme a-t-il jamais été clairvoyant à l’endroit de la chose publique ?

L’Espagne et l’Irlande offrent seules quelques alimens à la curiosité des hommes politiques. Partout ailleurs rien de nouveau, rien d’apparent, de saillant du moins.

À l’intérieur, il est une preuve irrécusable de la tranquillité dont nous jouissons, c’est que le gouvernement voyage et s’amuse. Un ministre est dans le midi, l’autre est au nord, un troisième dans l’est ; que sais-je ? À coup sûr, les polices des gouvernemens absolus ne diront plus que les pays constitutionnels sont des volcans qu’on ne saurait assez surveiller, que Paris en particulier est comme une bombe toujours chargée et toujours prête à éclater sur le monde.

M. le maire du Mans a seul troublé notre repos par sa harangue à M. le duc de Nemours. En parlant de la commune, du département, du royaume, de la politique passée, présente et future, M. le maire n’a oublié qu’une chose, les convenances. Il ne les aurait pas oubliées, si l’usage avait voulu que le prince parlât le premier ; son excellent discours les aurait rappelées même à l’esprit le plus distrait, et le Montesquieu du Mans aurait ainsi évité les foudres ministérielles.

Voici un autre petit fait qui ne laisse pas d’être instructif et curieux. M. de