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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 3.djvu/734

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regimbe, on tergiverse, on se donne au besoin des airs farouches, rétrogrades, on se flatte même de faire preuve de courage et d’esprit, en résistant à la vérité, en foulant aux pieds la justice et le bon sens ; vains efforts ! on peut faire taire sa conscience, mais nul n’impose silence à la conscience publique, qui, d’une façon ou d’une autre, élève sans cesse la voix et obtient enfin ce qu’elle réclame.

Le gouvernement anglais n’en est point encore aux concessions. Il ne peut pas brusquer ainsi son parti, faire du premier coup entendre raison à ses amis. S’il désire satisfaire l’Irlande, il veut avant tout ne pas blesser, ne pas irriter l’Angleterre. Il a fait pour le moment ce qu’il pouvait. Sir Robert Peel a déclaré, aux bruyans applaudissemens du parlement, que le cabinet, unanime sur ce point, désirait éviter une collision en Irlande, et avoir recours à tout autre moyen que la force. Il ne se dissimule pas que quelques personnes l’accuseront de faiblesse ; mais, fort de la bonté de sa cause, il ne suivra pas moins la voie qui lui paraît la plus propre à assurer la gloire et la prospérité de l’empire.

Cette déclaration se trouve confirmée par un incident qui a eu lieu à la chambre des communes à l’occasion d’une motion faite à la chambre des lords. Lord Brougham a proposé un bill ayant pour objet de prohiber les assemblées séditieuses en Irlande. Il l’a présenté comme étant à peu près la reproduction de celui que la chambre avait adopté en 1833. Le bill ayant été lu une première fois, lord Brougham a annoncé que dans la prochaine séance il en proposerait la seconde lecture

À cette occasion, un membre de la chambre des communes, M. Roche, a interpellé le ministre dirigeant pour savoir si le gouvernement avait réellement l’intention d’appuyer et de sanctionner le bill proposé par le docte lord ; un grand nombre de députés irlandais ayant déjà quitté Londres, il fallait avoir le temps de les rappeler au besoin. Sir Robert Peel a répondu qu’il n’était pour rien dans la présentation du bill ; que, si le gouvernement avait cru une mesure de cette nature nécessaire, il aurait pris l’initiative et en aurait assumé toute la responsabilité ; bref, qu’il ne serait pas disposé à l’appuyer comme mesure officielle, et qu’à l’occasion de ce bill M. Roche n’aurait nullement besoin de rappeler à Londres ses amis.

Ainsi il est bien positif que le gouvernement veut s’en tenir au bill des armes, et que l’Irlande pourra continuer ses pacifiques meetings. L’Irlande n’a qu’une voie à suivre, la voie qu’O’Connell lui trace, qu’un vœu à former, c’est qu’O’Connell vive, et qu’il voie se prolonger sa verte et vigoureuse vieillesse.

Le traité conclu entre l’Angleterre et la France relativement aux pêcheries vient d’être présenté à la chambre des communes. Lord Palmerston n’a pas manqué de soulever une chicane au sujet de l’une des dispositions du traité. Le noble lord trouve mauvais qu’on ait permis aux bateaux français de jeter l’ancre, dans certaines circonstances, sur les côtes de l’Angleterre ; il préfé-