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POLITIQUE FINANCIÈRE DE L’AUTRICHE.

cessité de faire concourir la noblesse aux charges publiques a été discutée dans les assemblées de comté (congrégations) qui préparent les travaux de la diète nationale : dans plusieurs provinces, la motion a été approuvée en principe ; ailleurs, elle a été étouffée par une opposition tumultueuse. La cour de Vienne, affectant l’impassibilité, n’intervenant que pour prévenir les désordres, semble vouloir laisser à la noblesse hongroise tout l’honneur du sacrifice. La crise peut être plus ou moins prolongée ; mais déjà le succès de la réforme n’est plus douteux, parce qu’elle doit être profitable à ceux même qui résistent, et que les intérêts finissent toujours par triompher des préjugés et des passions.

Si la noblesse hongroise recueille encore le bénéfice de la loi féodale, elle en subit en revanche les inconvéniens. La terre qu’elle possède ne lui est attribuée qu’à titre de fief héréditaire : la propriété n’est pour elle qu’une sorte d’usufruit dont la transmission est restreinte à une seule famille, de sorte qu’à l’extinction de cette famille, le roi, seigneur suzerain, rentre en possession du fief en invoquant l’antique loi du retrait seigneurial. Les propriétés qui ont ainsi fait retour à la couronne constituent présentement un immense domaine dont une exploitation intelligente tirerait des trésors. Les biens de l’état, en comprenant les forêts et les mines situées dans les diverses parties de l’empire, équivalent, suivant certaines statistiques, à une réserve d’un milliard de florins. M. de Tegoborski n’admet pas cette évaluation exagérée, mais il pense que les domaines de la couronne, dont le revenu représente aujourd’hui 12 millions de francs, pourraient rapporter trois fois plus. L’aliénation par petits lots de certaines parties de ce domaine fournit chaque année une somme assez considérable, ajoutée à la dotation de l’amortissement : on réserve prudemment cette ressource pour les circonstances exceptionnelles ; en 1841, les ventes n’ont produit que 818,031 florins, ou 2,126,880 francs.

Ce qui prouve mieux que toutes les conjectures la sécurité financière de l’Autriche, c’est la résolution qui vient d’être prise relativement aux chemins de fer. Assez confiant dans ses propres forces pour ne pas faire appel à l’agiotage, l’état a entrepris d’exécuter à ses frais, et pour son compte, les grandes lignes qui doivent traverser les diverses possessions autrichiennes dans les principales directions, de façon à les rattacher aux plus importantes communications déjà ouvertes ou projetées en Allemagne. Cette entreprise colossale, qui embrasse un tracé de plus de 200 milles allemands ou