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jours, un pays en Europe où l’on puisse impunément oublier toutes les règles d’une bonne administration et blesser le peuple à la fois dans ses intérêts moraux et dans ses intérêts matériels.

Ce qui se passe dans les états du pape, les troubles sans cesse renaissans des légations et des marches ont pour cause principale la mauvaise administration du pays. Il y a dix ans, l’Autriche et la France étaient intervenues à main armée ; l’Autriche occupait Bologne, la France Ancône. Si au lieu de ne voir dans cette occupation qu’une mesure de précaution, elles avaient voulu s’en faire un moyen d’assurer la paix des états pontificaux et de prévenir des troubles qui pourraient un jour compromettre le repos de l’Europe, l’Autriche et la France se seraient franchement réunies, non pour conseiller au pape de prendre à sa solde des Suisses, mais pour lui représenter que la déplorable administration de ses états les exposant sans cesse à des agitations qui sont un danger pour tous, l’occupation ne cesserait que lorsqu’un meilleur ordre de choses, un gouvernement raisonnable, serait fondé dans le pays. On n’a rien fait de pareil : on a quitté les états du pape sans rien obtenir, et voilà que tout recommence ; aujourd’hui les troubles, demain peut-être l’occupation et les embarras politiques qui en seront nécessairement les conséquences. On dit que Rome a déjà demandé un secours autrichien ; on ajoute que notre gouvernement lui a signifié, par une note, qu’une intervention autrichienne serait suivie d’une intervention française. Nous n’affirmons point des faits qui ne sont pas formellement à notre connaissance ; mais nous savons, comme tout le monde, qu’il ne serait pas moralement possible que les Autrichiens occupassent encore une fois les légations sans que le drapeau français flottât de nouveau dans une partie quelconque des états du pape. L’évacuation d’Ancône a été conditionnelle, et nous ne connaissons pas d’administration en France qui pût fermer les yeux sur une nouvelle occupation des états du pape par l’Autriche.

D’ailleurs, tous les gouvernemens italiens sont intéressés à ce que Rome prenne enfin quelque souci du bien-être de ses peuples, à ce qu’elle remplisse les promesses de 1831, car les agitations des états romains compromettent la sécurité de tous ces gouvernemens.

Les cortès ont commencé en Espagne leurs opérations, et rien n’autorise, jusqu’ici, à révoquer en doute le succès du parti parlementaire. Les partis extrêmes et les intrigans trouveront sans doute quelques représentans dans les cortès ; mais dussent-ils, ces opposans, se réunir tous contre le gouvernement, il ne semble pas qu’ils puissent former une majorité. Ils rendront peut-être les débats difficiles, longs, violens : il faut s’y résigner ; l’essentiel est que le résultat ne soit pas douteux. La violence de l’opposition aura l’avantage de resserrer de plus en plus les liens du parti gouvernemental. Ce qui importe c’est que la question de la majorité de la reine soit décidée sans retard. C’est le seul moyen de couper court à une foule d’intrigues et de combinaisons de bas étage. Aujourd’hui, en présence d’un gouvernement provisoire qui est et qui n’est pas, et qu’on ne sait pas trop comment qualifier, on conspire à son aise, et pour ainsi dire sans crainte et sans remords. Une fois que