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pour la civilisation, ce que l’arche fut pour Noé et ses enfans, — un rempart contre le déluge.

L’ordre et la liberté grandissant ensemble n’apporteront-ils pas des modifications dans la condition des femmes ? Quelles seront ces modifications ? C’est le secret de la Providence, et il serait téméraire de vouloir le lui arracher. Ce qui est certain, c’est que leur avenir dépend d’elles en grande partie. Si aujourd’hui qu’elles ont plus de lumières qu’autrefois, elles s’efforçaient de retrouver cette dignité qui relevait leur ignorance, et qui donnerait un si beau lustre à leurs connaissances actuelles ; si, maintenant qu’on leur rend justice, elles mettaient de la mesure dans leurs exigences ; si, sous leur influence, la vie intérieure s’améliorait, et si les relations du monde gagnaient de l’agrément et du sérieux, des progrès réels ne s’accompliraient-ils pas dans leur condition, sans secousse, sans être vivement appelés ? Ne sortiraient-ils pas du sein des choses ? — Les femmes qui ont reçu le don du talent pourraient mieux que les autres contribuer à préparer cet avenir ; mais quelle que soit leur éloquence, quelle que soit la forme de leur génie, surtout si elles veulent faire connaître le cœur humain et corriger la société ; si elles sont moralistes enfin, qu’elles n’oublient jamais, ce qui leur arrive trop souvent, ce tact qui n’est qu’une forme du goût, et cette modération, inséparable compagne du bon sens, qui chez elles est une grace et une vertu !


Paulin Limayrac.