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transportait dans le même temps et par la même voie, au commencement de 1844, 1, 096,428 livres sterling, ou près de 27 millions et demi, d’où il suit qu’en trois ans ce service a presque sextuplé. Ces chiffres répondent surabondamment aux objections présentées contre le projet de M. de Lavergne. Ils montrent que nous avons, comme le disait l’auteur de la brochure, dans notre service des articles d’argent, un germe précieux, et qu’il ne tient qu’à nous de développer.

Nous recommandons ces faits à la commission de la chambre des députés chargée d’examiner la proposition de M. de Saint-Priest sur la réforme des postes. L’abaissement excessif du prix des lettres est une question douteuse, controversée, que l’expérience anglaise n’a pas encore complètement résolue ; la réduction du droit perçu sur les articles d’argent ne peut plus faire question. Chacun de nous peut voir tous les jours quel obstacle met aux opérations du commerce et aux plus ordinaires exigences de la vie le prix quelquefois exorbitant du change. Il est avantageux et commode pour tous de pouvoir envoyer ou faire venir à peu de frais, d’un bout du territoire à l’autre, des sommes d’argent plus ou moins considérables. Pourquoi hésiterait-on un seul moment à se procurer cet avantage, dès l’instant qu’il est démontré par l’expérience qu’on peut le faire sans inconvénient ?

Nous ne comprenons pas que les journaux, par exemple, n’apprécient pas fortement cette amélioration. Ils y sont plus intéressés que d’autres. À l’heure qu’il est, les abonnés des provinces qui veulent payer leur abonnement à Paris par un mandat sur la poste sont obligés d’ajouter au prix payé 5 pour 100 en sus, ce qui augmente de 4 fr. le prix des journaux à 80 fr. De leur côté, les journaux qui veulent éviter cette dépense additionnelle à leurs abonnés sont forcés de s’adresser, dans les départemens, à des entreprises auxquelles ils accordent de fortes remises. Moyennant une simple prime de 1/2 pour 100 à laquelle personne ne voudrait se soustraire, les abonnemens pourraient tous être servis à l’avenir par de simples mandats sur la poste, et ce serait une grande source d’embarras et de pertes de moins pour les journaux. Il en est de même pour tous les marchands de détail de la capitale qui expédient pour la province, et qui ont souvent à recevoir de petites sommes, que l’élévation du droit actuel éloigne de la poste.

À ce sujet, M. de Lavergne avait proposé une nouvelle extension du service des articles d’argent qui ne peut donner lieu à aucune difficulté. Il demandait qu’on érigeât la poste en banque générale de recouvrement. Voici comment : chaque personne qui aurait une somme quelconque à recouvrer sur un point quelconque du territoire remettrait à la direction des postes du lieu qu’elle habite un mandat acquitté à l’ordre de son débiteur. Ces mandats, qui paieraient comme lettres simples, seraient présentés à domicile par les facteurs, et au bout de quinze jours, temps plus que nécessaire pour l’aller et le retour d’un bout de la France à l’autre, la poste rendrait à