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d’entraîner ainsi l’Union dans une guerre ; que cette guerre peut être plus dangereuse qu’on ne croit, si le Mexique trouve des alliés en Europe enfin, qu’elle serait souverainement injuste, le Mexique n’ayant jamais abandonné ses droits sur le Texas. « Je ne crois pas que la faiblesse d’un pays puisse, dans aucun cas, être pour nous un motif de nous engager dans une guerre ou d’en mépriser les maux. L’honneur, la bonne foi et la justice nous obligent envers les faibles aussi bien qu’envers les forts. Et si un acte d’injustice devait être accompli envers une puissance, il serait plus compatible avec la dignité de la nation, et, à mon sens, moins déshonorant de le commettre envers un état puissant… Supposez que la Grande-Bretagne et la France, ou l’une des deux, prennent parti pour le Mexique, et déclarent dans un manifeste que leur but est d’assister un allié faible et sans appui, pour arrêter l’esprit d’envahissement et l’ambition d’une république déjà trop accrue et qui cherche de nouvelles acquisitions ; de maintenir l’indépendance du Texas à côté de celle des États-Unis ; enfin, d’empêcher la propagation de l’esclavage : — quel serait l’effet de semblables déclarations sur l’opinion du monde impartial et éclairé ? »

M. Clay subordonne donc tout au consentement du Mexique ; puis, en supposant ce consentement obtenu, il fait encore dépendre l’annexation du vœu unanime de la nation : il ne croit pas permis d’ajouter de nouveaux membres à l’Union contre le vœu d’une partie des anciens. Il n’admet pas comme motif légitime la nécessité de maintenir l’équilibre entre les états, car elle justifierait l’envahissement successif de toute l’Amérique ; il s’appuie des déclarations du ministère anglais pour traiter de fables les vues ambitieuses qu’on prête à l’Angleterre, et il croit que l’avenir le plus désirable pour l’Amérique du Nord, c’est d’être partagée en trois républiques, le Canada, les États-Unis et le Texas, qui se balanceraient et se défendraient mutuellement contre la tyrannie. Enfin il termine cette longue lettre par une conclusion fort peu équivoque : « Mon opinion peut se résumer en peu de mots : je considère l’annexation du Texas dans le moment actuel, sans le consentement du Mexique, comme une mesure qui compromet le caractère national et nous entraîne à coup sûr dans une guerre contre le Mexique et probablement avec d’autres puissances, dangereuse pour l’intégrité de l’Union, hors de propos dans la situation financière actuelle du pays, et nullement appelée par une manifestation générale de l’opinion publique. » M. Clay, pas plus que M. Van Buren, n’a réussi à satisfaire tout le monde. Le tiers-parti, c’est-à-dire les abolitionistes, lui reprochent de n’avoir pas attaqué le