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Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 7.djvu/743

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DE L’INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE EN FRANCE.

La mode prend indistinctement naissance dans tous les pays civilisés ; en passant d’un peuple à l’autre, elle reçoit un cachet particulier qui laisse cependant toujours entrevoir son origine. En Asie, en Égypte, dans l’ancienne Thrace, elle a vaincu la répulsion de l’islamisme pour les coutumes franques, et elle fera au moins par l’extérieur une seule famille de toutes les nations. En attendant ce temps encore éloigné, les peuples barbares doivent être vêtus à leur guise, et nos échanges avec eux se baser sur d’autres goûts que les nôtres.

Nous allons, à cette heure, essayer de comparer notre commerce réel avec celui que l’étranger fait chez nous. Si dans les documens officiels de notre commerce d’exportation nous portons notre attention sur les articles de tissus, nous trouvons qu’il est sorti de France en 1843 :

DE FABRICATION
FRANÇAISE.
D’ORIGINE
ÉTRANGÈRE.
Tissus de soie, pour 
129,579,499 fr. 33,469,810 fr.
de laine 
79,576,547 20,967,605
de lin et chanvre 
9,663,571 12,062,150
de lin, batistes et linons 
8,252,320 328,840
de coton 
82,070,943 39,186,182
matières diverses 
487,216 1,175,208
Fils divers 
3,019,091 2,212,294
Total 
312,649,187 fr. 109,402,089 fr.

Les tissus exportés de France, ayant une valeur totale de 422 millions, représentent près de la moitié de notre commerce général ; pour avoir le taux du commerce réel des tissus, il faut donc en distraire 109 millions, ou au-delà du quart, qui appartient à la fabrication étrangère. Bien plus, notre commerce spécial renferme la consommation de nos colonies, qui n’ont pas la faculté de se pourvoir ailleurs et qui sont seules à acheter nos toiles natives ou nationalisées, et aussi une bonne partie de nos calicots ou cotonnades. Dans notre exclusion des marchés étrangers, les produits qui nous font défaut sont ceux que nos manufacturiers négligent par incurie ou par fausse direction, entraînés qu’ils sont par les applaudissemens des expositions publiques, si favorables aux articles de luxe et d’exception, si peu soigneuses de mettre en évidence ce qui tient aux consommations des masses. Un coup d’œil jeté sur les résultats particuliers de chaque industrie justifiera nos assertions.

Les soieries ont toujours été considérées comme une branche où tout le monde doit nous céder la palme. Nous possédons depuis long-temps