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fièvres pestilentielles ont enlevé tous ceux qui ont voulu explorer ses rives. La chaîne de montagnes désignée sous le nom de Serra du Grand-Mogol, située à environ cinquante-huit lieues de Diamantina, est le théâtre d’exploitations importantes. Malgré les fatigues inséparables d’une excursion dans les montagnes du Brésil, je résolus de me diriger vers la Serra du Grand-Mogol, sauf à retarder de quelques jours le voyage que je comptais faire sur le Jequitinonha jusqu’à Bahia. J’étais curieux de voir l’exploitation des diamans sous ses deux faces, dans le lit des rivières et sur le flanc des montagnes. La grande difficulté était de trouver un guide : l’excursion était périlleuse, il fallait traverser un pays désert pour se rendre dans un lieu éloigné de toute voie de communication. Un mulâtre s’était engagé à m’accompagner après quelques jours de réflexion, la peur le prit, et il refusa de partir. Placé enfin dans l’alternative de m’accompagner ou de passer trois mois en prison, il s’arma de résolution, et je n’eus plus tard qu’à me louer de ses soins.

Je ne pris pas congé sans regret des aimables habitans de Diamantina ; pendant mon séjour près d’eux, j’avais été vivement touché de l’empressement qu’ils mettaient à satisfaire ma curiosité. Je quittai Diamantina le 10 janvier 1843. Sans m’arrêter à Modania, petit village de deux cents maisons d’assez belle apparence, je traversai le Rio-Manso, et j’arrivai à l'arroial (bourg) qui porte le nom de la rivière. Cet arroial, bâti entre les deux bras du Rio-Manso sur une île assez fertile, compte six cents habitans et deux églises. Ce bourg est renommé pour la salubrité des environs, malgré l’élévation de la température. J’allai demander l’hospitalité à un vieux colonel, qui me donna quelques renseignemens curieux sur l’état de la province. Un missionnaire venait d’y exercer par ses prédications une grande influence. Mon hôte attribuait à l’effet des paroles du missionnaire la tranquillité qui n’a cessé de régner dans cette partie de la province, dont la population ne s’est pas soulevée contre le gouvernement. Le missionnaire avait engagé les fidèles, en venant à l’église, à apporter sur leur tête des pierres destinées aux réparations de ce temple. Les habitans avaient accompli scrupuleusement cette prescription, mais ils s’en étaient tenus là, et les pierres restées en tas attendaient encore la main de l’architecte. Les résultats moraux de la mission avaient été plus satisfaisans. On me cita plus de cent mariages conclus et célébrés, grace aux exhortations du prédicateur. Des filles même de mauvaise vie se signalèrent par leur zèle religieux. A Diamantina, comme dans tous les villages un peu importans du district, l’empressement