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d’un poids assez élevé, et presque pur. Cet or se trouvait au pied de la montagne, dans un terrain d’alluvion, et, dit-on, en grande abondance. Les diamans, quoique fragiles, sont plus brillans que ceux des Aroueras, et ont des formes plus régulières. Quant au Morro do Chapeo, exploité depuis longues années, les diamans y sont très fins, mais aussi très rares. Tout tend donc à prouver que la chaîne de montagnes qui s’étend depuis le Jequitinonha jusqu’au San-Francisco contient beaucoup d’or et de diamans. Ces découvertes inattendues ont donné de grandes espérances aux habitans de ces montagnes, et notamment à ceux de la Serra du Grand-Mogol. Tous ont l’espoir de découvrir de nouvelles mines ; mais d’immenses dangers sont semés sur la route où se jettent avec tant d’empressement les spéculateurs. Aux Aroueras, les diamans sont tombés tout à coup de 600 francs, prix de l’octave, à moins de 300. L’abondance des diamans aurait pu racheter l’abaissement des prix, et les bénéfices seraient restés considérables ; mais dans un désert aride, éloigné de plus de cent lieues d’un centre de population, les denrées les plus communes ont atteint une valeur presque fabuleuse. L’alquière de maïs, qui se vend généralement 2,000 reis (6 francs), se vendait aux Aroueras de 80 à 100 francs ; l’alquière de riz coûtait 250 francs. Les mules ne trouvant aucune nourriture dans les abords de la mine, il fallait les envoyer chercher leur pâture à une et deux journées de distance. Quant à l’état moral des habitans, il était ce qu’il est partout où des aventuriers de toute classe s’agglomèrent sur un même point. Dans l’espace de six mois, sur une population de moins de deux cents personnes, il y avait eu dix-huit meurtres suivis de vol.

Je revins à l’arroial du Grand-Mogol, assez désenchanté du nouvel aspect sous lequel le Brésil s’offrait à moi ; j’entendis tous les habitans se plaindre de la diminution des diamans. Les terres voisines, ayant été lavées et relavées, sont devenues stériles, et le Grand-Mogol sera, dans quelques années, abandonné par tous ces hommes qui n’y sont retenus que par le désir de faire fortune. J’assistai un dimanche à la vente des diamans. Les nègres apportent les pierres trouvées pendant la semaine, et vont d’un négociant à l’autre, espérant obtenir un prix avantageux ; au dire des négocians, la quantité offerte ainsi diminue tous les mois, et, les diamans venant à manquer, le commerce est paralysé.

Les mines de diamans forment une branche importante des produits du Brésil, et il serait temps que le gouvernement adoptât quelques mesures d’utilité publique, qui, tout en lui permettant de prélever sur le produit des mines un impôt modéré, remédiassent aux nombreux