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bureau de la ville, composé du prévôt des marchands, de quatre échevins, d’un procureur du roi, d’un greffier et d’un receveur, avaient la régie des revenus communaux, la police du pain et du vin, et une certaine initiative en fait de travaux d’embellissement ou d’utilité publique. Quant aux revenus, ils n’étaient pas perçus souverainement en vertu de ces principes d’ordre public qui légitiment les impôts ; ils résultaient de concessions faites capricieusement par les princes, de droits acquis à diverses époques par le corps municipal. Ainsi, au XIIe siècle, Philippe-Auguste abandonne à la ville certains droits de la couronne pour être consacrés à l’extension du mur d’enceinte. En même temps, les marchands de l’eau, c’est-à-dire l’antique corporation privilégiée pour la navigation de la Seine, obtiennent en partie les attributions de la police urbaine exercées jusqu’alors par des officiers royaux. Un peu plus tard, les différens corps de métiers tendent à l’association, et, unissant leurs privilèges particuliers à ceux des marchands de l’eau, ils forment cette immense fédération bourgeoise dont le chef électif prend le titre de prévôt des marchands. La construction d’un port de débarquement et d’un entrepôt pour les marchandises légitime l’octroi d’un impôt à prélever sur les consommations de la ville. Au moyen d’une rente annuelle payée au fisc royal, on achète le droit de triage dans les rues et de vente dans les marchés. L’inspection des poids et mesures, la juridiction en matière de commerce, procurent également des droits utiles. Les ressources de ce genre suffisent tant que les élus de la cité conservent une action indépendante. Malheureusement, à partir du règne de Louis XIV, l’influence de la royauté neutralise le pouvoir municipal ; l’élection populaire n’est plus qu’une vaine parade ; le trafic des charges, les abus de la faveur décident de toutes les nominations ; les affaires de la bourgeoisie sont faites, non plus par des représentans sincères, mais, comme nous l’avons dit plus haut, par plusieurs pouvoirs qui se neutralisent réciproquement.

Lorsqu’en 1789, la nation fut appelée à exprimer ses vœux et ses espérances de régénération, la réforme du régime municipal fut l’un des points sur lesquels on insista le plus généralement. L’assemblée constituante ne démentit point son mandat, et, en ce qui concerne Paris, la loi du 21 mai 1790 organisa une municipalité purement élective, composée d’un maire, de seize administrateurs, de trente-deux conseillers, de quatre-vingt-seize notables et d’un procureur-syndic, en tout cent quarante-six membres, répartis en cinq bureaux, i chacun desquels était confié un des grands intérêts de la commune.