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accoutumé à être obéi, que cela ne lui convient pas ; mais aussi, en prince magnifique et libéral, il les comble de présens. Ce sont des tissus de coton d’une grande beauté, des étoffes de plume, article dans lequel les Mexicains excellaient, et qui leur était propre. Ce sont des bijoux d’or et d’argent d’un grand poids et d’une façon égale à la matière. C’est de la poudre d’or à pleins casques ; Cortez avait dit à Teutlile que ses compagnons étaient sujets à une affection de cœur pour laquelle la poudre d’or était un spécifique souverain. À ces dons splendides, Cortez répondit comme il le pouvait, par une toque ornée d’une médaille en or représentant saint George et le dragon, par des chemises de Hollande, les plus fines qu’il possédât (les Mexicains ne connaissaient pas le lin), et par des articles de verroterie qui pouvaient paraître d’un grand prix chez ces peuples où l’art du verrier était ignoré. Moyennant ces échanges, on pouvait se croire en bons rapports ; les Indiens du voisinage apportaient des vivres en abondance aux Espagnols et se mettaient à leurs ordres pour tous leurs besoins. Cortez continuait de négocier pour qu’on le laissât aller à Tenochtitlan (Mexico) ; mais au milieu d’une conférence l’heure des vêpres sonne, et Cortez imagine que le moment est venu de faire connaître aux Aztèques la loi religieuse dans laquelle il a tant à cœur de les instruire. Par son ordre, le père Olmedo commence une prédication où il expose les mystères du christianisme, et annonce que les Espagnols sont venus pour extirper l’idolâtrie et établir le culte du rai Dieu. Il termine en distribuant de petites images de la Vierge avec le Christ dans ses bras. Deux interprètes, l’Espagnol Aguilar, qui a été captif dans le Yucatan, et la jeune fille indienne Malinche, livrée à Cortez par un des caciques de Tabasco, transmettent tant bien que mal la parole du bon père aux Aztèques étonnés. De ce moment, toute relation est rompue. Pas un des naturels ne se présente au camp ; il ne vient plus de provisions, et, parmi les suivans de Cortez, les mécontens commencent à dire qu’il faut s’en retourner à Cuba avec les présens somptueux de Montezuma.

Cependant Cortez reçoit un message du chef des Totonaques, établis autour de Cempoalla dans la Terre-Chaude. Las des exigences des Aztèques, qui l’avaient récemment soumis, ce cacique envoie demander l’assistance de ces merveilleux étrangers qui lancent le tonnerre et ont avec eux des animaux à l’irrésistible impétuosité. Il est puissant, il se vante d’avoir cent cinquante mille combattans sous ses ordres, hyperbole extrême, quoique sa capitale Cempoalla eût réellement trente mille ames. Ce fut pour Cortez une révélation. Ce grand empire