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qui, sous l’impulsion puissante de Tchingis-Khan, s’élevèrent à la fin du XIIe siècle jusqu’au rôle de conquérans, s’emparèrent de la Chine, de la Corée, et, sous le nom de Tartares ou de Mongols, vinrent jusque sur les bords du Volga et de la mer Caspienne porter le nom de leur maître et la terreur de ses armes. Expulsés plus tard de l’empire chinois, ces peuples se replièrent de plus en plus sur l’Asie centrale, et inondèrent sous différens noms jusqu’aux contrées qui font aujourd’hui partie de la Sibérie. Plusieurs de leurs tribus se réunirent et parvinrent même à fonder dans l’Asie centrale des états assez puissans ; mais bientôt ces empires éphémères tombèrent sous les coups des Chinois. Mongols et Tartares furent en partie exterminés. Un grand nombre de tribus cherchèrent un asile dans l’Altaï et implorèrent la protection de la Russie, qui les admit au nombre de ses sujets ; quelques autres restèrent sur les limites des deux empires, et reconnurent à la fois les deux souverainetés de la Chine et de la Russie. Encore aujourd’hui, elles paient l’impôt à la cour de Pékin aussi bien qu’à celle de Saint-Pétersbourg, et sont en conséquence désignées sous le nom de peuples à double tribut.

Presque partout où la race victorieuse des Mongols venait s’établir, elle trouvait la contrée occupée par des tribus d’origine turque. Du croisement de ces deux races naquirent d’un côté les Tatars ou Tartares qui habitent la Russie européenne, chez lesquels l’élément turc est resté prédominant, et les Kalmouks de la Sibérie, dont le type mongol s’affaiblit à mesure qu’ils ont avancé davantage vers l’ouest. Le langage a subi les mêmes influences, et dans toute la vaste étendue de pays occupé par ces deux grands peuples, on parle une espèce de jargon turc plus ou moins corrompu.

Cette opinion sur l’origine des Kalmouks est justifiée par deux faits rapportés par M. de Tchihatcheff. D’un côté, en franchissant la chaîne des Sayanes et en pénétrant ainsi dans l’empire chinois, il a pu observer de près les Soyons, qui ne différaient presqu’en rien des Kalmouks de son escorte. D’autre part, il signale en plein Altaï, sur les rives de l’Akabane, l’existence de quelques tribus kalmoukes désignées sous le nom commun de Sagaïs, bien distinctes de toutes les autres et dont les traits rappellent presque complètement le type de la race turque. La langue de ces tribus diffère sensiblement de l’idiome kalmouk. Quoiqu’elle ne soit qu’un dialecte turc très corrompu, elle se rapproche bien plus de la langue mère et est incomparablement moins mélangée d’expressions mongoles.

Les Kalmouks sont essentiellement des peuples nomades. Groupés