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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/582

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la force du caractère ; il a fondé en France la monarchie constitutionnelle ! — Telles sont les apologies que des gens qui se disent sérieux ne craignent pas de publier le lendemain de la clôture d’une session pendant laquelle le ministère a failli plus d’une fois tomber devant la chambre ! C’est le cas de dire comme M. Guizot : On croit rêver.

Entre les exagérations naïves de l’optimisme ministériel et la rigueur d’une opposition qui condamnerait aujourd’hui le ministère sur tous les points de sa politique, il y a, nous le croyons, un sage milieu à tenir. Les derniers actes diplomatiques du cabinet méritent l’approbation de tous les gens sensés. Il est d’autant plus facile à l’opposition modérée de les sanctionner par, son suffrage, qu’elle-même les a conseillés, et qu’ils sont comme un hommage rendu à la sagesse de ses principes. Du reste, bien des griefs subsistent contre le cabinet du 29 octobre, et il aura beaucoup à faire avant de pouvoir rallier autour de lui toutes les nuances du parti conservateur. L’opposition modérée a donc toujours la même tâche à remplir. Elle n’a rien à rétracter, rien à désavouer. La ligne qu’elle s’est tracée, le langage qu’elle a tenu, les alliances qu’elle a contractées sans aliéner son indépendance, tout cela n’a pas été inutile. Sans cette pression salutaire exercée sur le cabinet, la politique instinctive du 29 octobre aurait peut-être triomphé. Elle n’aurait pas senti la nécessité de se modifier, de se corriger et de se contredire elle-même. Elle aurait suivi librement ses inspirations. Puisque la lutte contre certaines tendances du cabinet a déjà produit de bons résultats, il faut la continuer. Puisque le ministère du 29 octobre a eu le bon esprit de ne pas s’opiniâtrer dans ses idées, puisqu’il avoue ses erreurs, puisqu’il transige facilement avec les opinions de ses adversaires, puisqu’il accepte volontiers leur politique, quand c’est le seul moyen pour lui de conserver la majorité, il faut profiter de ces dispositions heureuses, que n’ont pas montrées, malheureusement pour eux, tous les cabinets. Nous faisons chaque jour quelque nouveau progrès dans la manière de comprendre le gouvernement représentatif. Jusqu’ici, depuis quinze ans, un faux point d’honneur, que l’on appelait de la dignité et de la franchise, avait poussé tous les ministères à résigner le pouvoir dès que leur politique était vaincue ; les ministres du 29 octobre ont supprimé cette folle coutume. Leurs dissentimens avec la majorité sur le droit de visite, sur la dotation, sur le banc des évêques, sur les ministres d’état, et sur vingt autres objets, ne les ont pas empêchés de conserver leur poste ; seulement, pour y rester, ils se sont empressés, dès qu’il l’a fallu, de sacrifier leurs convictions à celles de la majorité : heureux expédient, qui a supprimé les questions de cabinet. Puisque telle est la nature du ministère, il ne faut pas négliger ce qu’elle a de bon et de profitable. Il faut le surveiller et le contenir, surtout dans sa politique extérieure, car c’est là qu’il est le plus prompt à suivre ses instincts, et c’est aussi de ce côté qu’on a le moins de peine à modifier ses vues, à le ramener, et à obtenir le sacrifice de ses opinions les plus chères. L’affaire du droit de visite en est la preuve.

La question du Texas continue d’attirer les regards de la diplomatie. On