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la connaissance du général Rulhières, qui commandait le camp pendant l’absence du général Damrémont, lors de la dernière attaque des Arabes. Il voulut bien me raconter l’affaire avec de grands détails. Les combats se livraient tout autour du camp, sur les éminences qui le dominaient, de sorte que les troupes qui n’y étaient pas engagées en étaient cependant spectatrices et y prenaient la part la plus vive. Sur la droite de la porte méridionale du camp, et à une assez grande hauteur, était placé un poste retranché. Cette position escarpée avait été bravement attaquée par l’infanterie arabe qui escaladait avec intrépidité les rochers ; plusieurs de ces fantassins étaient venus se faire tuer à vingt-cinq pas de l’épaulement. L’ennemi avait de 7 à 8 mille chevaux qui couvraient tout le rideau des montagnes. Suivant le rapport d’un déserteur espagnol, il aurait perdu dans cette affaire près de 400 hommes. Les chefs portaient tous une large ceinture rouge comme marque distinctive. L’infanterie régulière du bey, précédée de sa musique, avait marché avec résolution contre le poste des zouaves, qui la repoussa néanmoins après un combat d’une heure. Dans ce mouvement, l’ennemi s’était assez rapproché du camp pour que le général Rulhières pût lui envoyer de la mitraille avec des pièces de position. En résumé, l’affaire avait été très chaude, et Achmet y était, dit-on, en personne.

Le 27 au soir, M. le duc de Nemours nous annonça que nous partirions : le 1er octobre. Cette nouvelle fut accueillie avec joie par toute l’armée, car nous croyions devoir attendre à Medjez-el-Hammar l’arrivée des troupes qu’on faisait venir de France.

Nous visitâmes avec soin, dans la matinée du lendemain, les dehors du camp, les fortifications, les hôpitaux, la tête du pont de la Seybouse, ainsi que la manutention des vivres. Tout était dans un bel état d’entretien et de conservation. Après avoir pris une demi-heure de repos, nous repartîmes pour aller visiter dans les environs une source d’eaux thermales fort curieuse nommée Hammam-Mescoutin (les eaux enchantées). Nous longeâmes, dans notre excursion, les rives escarpées et boisées de la Seybouse, dont nous remontions le cours en suivant de petits sentiers fort pierreux, très peu fréquentés, et traversant de temps en temps des gués étroits et difficiles. Nos chevaux se tirèrent parfaitement de cette épreuve. Je ne conçois pas cependant comment ils ne s’abattirent pas cent fois sur les gros cailloux ronds qui couvrent les chemins et les lits des ruisseaux. Nous avions pour escorte un escadron de chasseurs, et les états-majors réunis du prince