mètres de largeur qui s’élève comme un dos d’âne entre la gorge où coule le Rummel et la vallée dont je viens de parler. Protégée partout ailleurs par la nature de ses escarpemens, Constantine n’était accessible que par cet endroit. Aussi le bey avait-il fait consolider et exhausser les anciennes murailles romaines qui couvraient ce front de la ville ; elles étaient percées de créneaux et armées d’une nombreuse artillerie. On avait fait disparaître en outre et rasé toutes les constructions qui, situées entre le pied du Coudiad-Aty et la porte d’El-Gharbia, avaient, l’année précédente, facilité nos approches en protégeant notre infanterie contre le feu du rempart.
Un énorme étendart rouge, portant au centre une épée blanche à une seule poignée avec deux lames, flottait sur la porte dont je viens de parler ; c’était l’étendart d’Aly. Le bey, en déployant les couleurs de l’islam, nous annonçait que son intention était de faire résistance. Cependant nous n’osions l’espérer encore, et nous nous attendions à voir paraître quelque députation portant les clés de Constantine.
Notre incertitude ne fut pas de longue durée ; nous venions à peine de nous montrer sur la crête du Mansourah, et par conséquent en vue de la ville, que la population tout entière, qui nous attendait sans doute avec quelque anxiété, salua notre apparition par des cris sauvages et mille fois répétés ; c’étaient de ces sons gutturaux que connaissent tous ceux qui ont voyagé en Afrique. Presque en même temps une vive lumière suivie d’un épais nuage de fumée blanchâtre brilla à notre droite, et un boulet de 24, qui en ricochant couvrit de terre le lieutenant-général gouverneur, nous apprit que la kasbah voulait aussi nous souhaiter la bien-venue. Désormais, il n’y avait plus à en douter, Constantine était résolue à se défendre, nous allions avoir un siège à faire. Grande fut la joie dans l’armée.
Le plateau de Sattah-Mansourah, que les deux premières brigades venaient d’occuper, s’étend depuis le marabout de Sidi-Mabrouk, en s’élevant peu à peu jusqu’à une distance de deux kilomètres environ ; là il se brise suivant une arête parallèle au Rummel qui baigne de deux côtés les contreforts de la ville. Cette arête termine brusquement le plateau ; les flancs escarpés de la montagne descendent alors presque à pic jusqu’au fond du torrent ; nous avions donc la ville devant nous et presque à nos pieds, et nous pouvions à l’œil nu distinguer parfaitement les habitans sur les terrasses et dans les rues. L’enceinte en est presque carrée ; à l’un de ses angles, celui que nous avions un peu à notre droite, le ravin du Rummel tourne en équerre et longe le côté nord-est du quadrilatère. De cet angle, où est située la porte d’El-Kantara,