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Les délégués qui la composaient recevaient 3 sh. 6 d. (4 fr. 50 cent.) par jour, s’ils appartenaient au district où se tenait la réunion, et 5 sh. (plus de 6 francs), s’ils venaient d’un autre district. On leur allouait encore les frais de leur dîner et des frais de voyage. Chaque loge devait rendre ses comptes tous les mois ; mais cela devenait quelquefois impossible, soit parce que les affiliés ne payaient pas exactement leur contribution mensuelle, soit parce que le caissier ou le comité lui-même détournait les fonds remis à sa gestion. On peut affirmer que l’infidélité des mandataires en qui les ouvriers avaient mis leur confiance a eu plus de part que toutes les autres causes réunies à la ruine de ces associations.

Les coalitions d’ouvriers dans le royaume-uni étant une sorte de franc-maçonnerie industrielle, il ne faut pas s’étonner si la cérémonie de l’admission se faisait avec un appareil de mystère et de terreur. La loge s’assemblait dans quelque taverne, vers neuf ou dix heures du soir. L’aspirant était introduit les yeux bandés, et quand le bandeau tombait, il se trouvait au milieu d’hommes revêtus de surplis, qui semblaient être là pour célébrer les rites de quelque religion inconnue. Dans un coin de la salle figurait un squelette, sur la tête duquel demeuraient suspendues une hache d’armes et une épée nue. Une table occupait le milieu ; sur cette table la Bible était ouverte, et sur le texte sacré, l’initié ou, pour emprunter les termes maçonniques, l’étranger devait prêter serment. Voici la formule du serment exigé par l’union des peigneurs de laine :


« Je soussigné, X…, peigneur de laine, en présence du Dieu tout-puissant, déclare volontairement que j’ai l’intention de prêter un appui persévérant à la confrérie connue sous le nom de « société charitable des ouvriers en stuff et autres ; » je m’engage solennellement à ne jamais agir en opposition avec la confrérie dans les efforts qu’elle fera pour maintenir le taux des salaires, et à y contribuer au contraire de toutes mes forces dans la mesure de la loi et de la justice, à l’aider dans ses tentatives pour assurer une rémunération légitime au travail. Je prends Dieu à témoin, dans cette déclaration solennelle, que ni espoir, ni crainte, ni récompenses, ni châtimens, pas même la mort ne pourra me déterminer, par voie directe ou indirecte, à donner le moindre renseignement sur ce qui se sera passé dans cette loge ou dans toute autre appartenant à la société, et que je n’écrirai rien sur papier, bois, sable, pierre ou toute autre chose, par quoi nos actes puissent être connus, à moins que les chefs de la société ne m’aient autorisé à le faire. Je ne consentirai jamais à ce que l’argent qui appartient à la société soit distribué ou qu’il serve à un autre usage qu’aux intérêts de la société et de l’industrie. Que Dieu me soit donc en aide et qu’il me permette de garder avec fermeté