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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/864

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quelque chose de si calme et de si confiant ! Cette délicate situation est habilement décrite par l’auteur ; à voir Faustine si heureuse, si tranquille dans son enjouement, rien ne semble plus régulier que l’engagement de Faustine et du comte. Nul ne songe à faire une question indiscrète et moqueuse.

La sérénité parfaite de la comtesse Obernau n’est pas seulement exprimée dans son bonheur de tous les jours, dans ses relations avec Anastase ; l’auteur amène ici un plaisant épisode qui va compléter le portrait de son héroïne. Il la conduit chez sa sœur, mariée à un gentilhomme campagnard, Maximilien de Wallsdorf, et la peinture de cet intérieur servira encore à mettre en lumière la gaieté de Faustine et sa liberté insouciante. La rusticité ambitieuse du hobereau, les qualités bourgeoises de sa femme, le contraste entre la finesse poétique de la comtesse et la vulgaire existence de la maison de Wallsdorf, l’aisance aimable qu’elle y apporte, puis les prétentions chevaleresques du jeune frère de Maximilien, l’amour enthousiaste de cet honnête rustre pour la poétique Faustine, la bienveillante ironie de la jeune femme, qui ne réussit pas à décourager cet adorateur imprévu ; tout cela compose un joli tableau de genre où se joue avec grace une malice inoffensive.

De Wallsdorf, l’auteur nous ramène à Dresde, et bientôt nous suivons Faustine et Anastase dans leurs excursions printanières vers les contrées du Rhin. Le roman, à vrai dire, n’avance guère ; c’est toujours un peu la même situation, que l’auteur prolonge à dessein pour que le drame des derniers chapitres, plus étrange, plus inattendu, éclate comme la foudre. Un jour, pourtant, le comte Andlau est obligé de quitter Faustine pour aller régler en Alsace des affaires de famille. Au milieu des reproches affectueux, des plaintes, des recommandations de Faustine, l’auteur écrit une page qui termine assez bien cette longue histoire d’amour. On y sent, sous l’amour ardent de la jeune femme, l’orgueil, l’impatience de son ame. C’est là ce qui la perdra. Elle est passionnée, mais on voit bien qu’elle est incapable de dévouement. Comment ces alarmans symptômes échappent-ils au comte Andlau ? C’est qu’il est trop loyal pour se défier jamais. Mais il a tort de s’endormir dans cette confiance imprudente ; une secousse terrible le réveillera. Pendant son absence, le comte Mario Mengen s’emparera de cette ame égoïste. Ce généreux Andlau, si grand, si noble, il est renié par Faustine dès qu’une nouvelle affection s’offre à elle. Le comte Andlau en mourra, Faustine le sait, elle le dit au comte Mario, elle se le dit à elle même, elle a toute conscience de sa cruauté,