Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
REVUE DES DEUX MONDES.

posés à terre, et qui les dérobent tout entiers aux coups de l’ennemi. Le roi préside, du haut de son char, à neuf batailles différentes ; il foule aux pieds de ses chevaux les mourans et les morts : les cadavres décapités prouvent que l’usage de trancher la tête aux vaincus était pratiqué par certains peuples bien avant les musulmans, qui décapitent, on le sait, leurs ennemis pour les priver du secours de l’ange qui doit les enlever au ciel. Le souverain, dominant la mêlée ou menaçant ses adversaires, est toujours accompagné de deux personnages. À côté de lui est le conducteur, penché en avant, de manière à être parfaitement maître de ses chevaux lancés au galop ; il les excite au moyen d’un fouet, ou les maîtrise en retenant vigoureusement de grandes guides sur lesquelles il allonge ses bras. Derrière, selon qu’il combat ou qu’il a déposé son arc, le roi est garanti des coups de l’ennemi par deux boucliers que soutient un guerrier, ou il est ombragé par un parasol, emblème suranné de la puissance souveraine, qu’un eunuque porte au-dessus de sa tête. Parmi les combattans, au milieu desquels le monarque assyrien paraît toujours en triomphateur, on reconnaît facilement ses ennemis ; leur costume est très différent de celui que portent les soldats de Ninive ; les uns sont vêtus de tuniques plus courtes et coupées autrement que celles des Assyriens ; d’autres sont couverts de peaux de bêtes ; ils combattent avec des armes d’une forme différente ; leurs boucliers sont carrés ; ils n’ont point la tête couverte d’un casque ni le corps enveloppé d’une cuirasse comme les guerriers ninivites, ce qui prouve qu’ils sont moins avancés en civilisation et sans doute moins belliqueux que les Assyriens, car, dans tous les temps, les nations guerrières se sont plus préoccupées que les autres des moyens de défense, sans négliger ceux qui pouvaient faciliter l’attaque. Parmi tous ces combattans, on reconnaît très bien un groupe de nègres à leurs cheveux crépus et à l’absence de barbe. Ce détail est précieux comme renseignement historique, car si l’on admet, ce qui ne me paraît pas douteux, que toutes ces nuances de costumes et de physionomies appartiennent à des peuples divers, on pourra ainsi se former une opinion des guerres et des conquêtes entreprises par ce souverain belliqueux qui prend, du haut de son char, une part si active aux combats. On peut trouver, dans l’étude de ces sculptures, les bases d’un travail qui jetterait quelque jour sur l’histoire de ce prince, et par suite sur l’origine de ces monumens, en attendant que les inscriptions qu’ils nous ont consacrées, traduites par nos savans philologues, vinssent prouver la justesse des inductions.

Continuant de parcourir ces salles immenses, on est émerveillé de