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Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/97

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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE À NINIVE.

des Égyptiens. D’après certaines pierres creusées en forme d’encastrement et trouvées de chaque côté des grandes portes extérieures, il paraîtrait qu’on y avait placé au pied des taureaux, et scellé dans ces dalles préparées ad hoc, un lion de petite taille, portant sur le dos un anneau dans lequel passait une chaîne qui s’attachait à un anneau correspondant planté dans la muraille. On doit penser que ces lions enchaînés au pied des taureaux majestueusement posés, et dont les ailes déployées attestent la libre puissance, avaient un sens mystique, et ce qui fortifierait cette opinion, c’est que je n’ai trouvé nulle part, dans les sculptures de Ninive, le lion en liberté. Indépendamment du rôle qu’on lui a assigné ainsi auprès des portes, il est le plus souvent représenté comme ornement de vases, de tables, de bracelets ou d’épées, mais toujours dans une position qui rappelle la servitude. On n’a trouvé qu’un seul des lions dont je parle ici ; ce lion est une ronde-bosse, et, d’après toutes les apparences, on doit le croire en bronze fondu. L’emplacement des autres peut d’ailleurs, nous l’avons dit, être reconnu avec certitude ; mais ils ont disparu, comme tous les autres objets en métal, dont l’absence dénote un pillage bien entendu. Les ennemis de Ninive ont suivi à la lettre les instructions que leur donnait le prophète Nahum dans ses anathèmes : « Pillez l’or, pillez l’argent ; les richesses de Ninive sont infinies, ses vases et ses meubles précieux sont inépuisables. »

À l’intérieur et sur les murs des salles, il y a deux genres de bas-reliefs ; les grands sont, à quelques variantes près, des répétitions de ceux qui sont sur les façades, et les seuls sujets nouveaux qu’ils représentent sont des génuflexions de captifs enchaînés et supplians devant le grand roi, qui, paraissant méconnaître le plus beau privilége de la royauté, leur fait subir sous ses yeux les plus cruels supplices. Quant aux bas-reliefs compris dans les deux zones étroites qui, avec les bandes d’inscriptions, se partagent la surface des murs, les scènes qui s’y trouvent retracées offrent plus de variété. Les uns représentent des combats livrés à des ennemis de nations différentes, si l’on en juge par la diversité des costumes, et des assauts donnés à plus de vingt forteresses, chacune accompagnée d’une courte inscription qui, très probablement, en conserve le nom. Ces tableaux, où les ressources militaires de l’antiquité apparaissent dans tous leurs détails, sont animés par des guerriers combattant à pied ou à cheval, avec la lance ou l’épée, et tenant au-dessus de la tête des boucliers circulaires qu’ils présentent à l’ennemi. On y voit, en première ligne, des archers qui bandent leur arc, décochent leurs flèches derrière de grands boucliers