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pour s’opposer aux progrès de la réforme. Devenu l’un des premiers instrumens de la conspiration ourdie par les princes de Lorraine et par le cabinet de l’Escurial contre la maison de France, David mit au service de cette cause les ressources d’un esprit inventif et d’une activité infatigable. Par ses écrits, par ses paroles et par ses démarches, il prépara les esprits à un changement que les évènemens semblaient préparer de loin, indiquant toujours les verdoyans rejetons de la tige de Charlemagne comme les successeurs naturels d’une royauté décrépite et d’une race abâtardie.

A Rome, où David s’était rendu pour exposer ses hardis projets, il fut accueilli avec froideur et inquiétude ; la prudence accoutumée du saint-siège s’alarma d’une telle entreprise et des chances redoutables qu’elle pouvait entraîner pour la cause catholique elle-même. Ce n’était pas à coup sûr le zèle qui manquait à Grégoire XIII et à Sixte-Quint : l’approbation donnée aux plus tristes scènes de cette époque ne l’avait que trop constaté ; mais le saint-siège comprit qu’un intérêt d’ambition se trouvait étroitement enlacé dans tous les plans de la ligue à l’intérêt religieux, et que les vues secrètes l’emporteraient promptement sur les résolutions patentes. Il jugea que ce n’était pas chose facile que de renouveler l’œuvre du pape Zacharie en face de la réforme maîtresse de la moitié de l’Europe, et d’altérer d’une manière notable l’équilibre du monde en faisant passer la France sous l’influence, pour ne pas dire sous la domination même de l’Espagne. C’était là une perspective qui alarmait fort sérieusement les souverains pontifes eux-mêmes, peu jaloux de jouer dans l’Italie conquise et dominée par la cour de l’Escurial le rôle d’aumôniers des rois catholiques. Rome s’alarmait surtout à la pensée que la puissance de la ligue finissant par absorber celle d’une royauté mise en tutelle, Henri III pouvait se trouver conduit à réunir ses forces à celles des huguenots pour échapper à la domination du parti catholique ; et, quel que fût son désir d’abattre l’hérésie dans le royaume très chrétien, le saint-siège reculait avec effroi devant la perspective de voir le protestantisme conquérir en France ce qui avait fait sa force en d’autres contrées, l’appui et le concours de l’autorité temporelle. De là les longues hésitations et les constantes répugnances de Sixte-Quint. Les déclarations du duc de Nevers, envoyé près de lui par le parti catholique, attestent les efforts persévérans du pontife pour arrêter les progrès de la ligue et ménager l’autorité royale tant que vécut Henri III. Sixte ne céda que devant des circonstances devenues plus fortes que sa propre volonté, tout énergique qu’elle pût être. Lorsqu’il donna