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REVUE DES DEUX MONDES.

Familiarisé de longue main avec les nations orientales, chez lesquelles il a vécu en qualité de voyageur et de consul, M. Fontanier est donc en mesure d’éclairer le public sur tout ce qui touche l’Inde dans ses rapports avec les pays environnans et dans son organisation intérieure. Après avoir parcouru la Perse et l’orient de la Turquie à des époques diverses qui embrassent une période de vingt années, il a pu étudier la double politique qui agit dans ces provinces. La suivre pas à pas, la surprendre dans son développement, la démêler à travers le voile sous lequel elle se cache, tel a été le sujet des deux premières parties de son voyage[1] ; le troisième volume est destiné à compléter ce tableau, auquel s’ajouteront encore le récit et l’appréciation des évènemens qui ont poussé les flottes anglaises vers les côtes du céleste empire.


Sous le titre de Charles Ier, sa cour, son peuple et son parlement[2], M. Philarète Chasles vient de donner une série d’études, à la fois piquantes et profondes, sur la révolution d’Angleterre. Laissant de côté la suite régulière des faits, l’enchaînement logique des évènemens, qui avaient été exposés dans le bel et sévère ouvrage de M. Guizot, M. Chasles s’est appliqué aux mœurs, aux caractères, aux curiosités biographiques, aux mille particularités inconnues de la vie d’alors, lesquelles expliquent très souvent les petites causes des grands évènemens. On a là l’intérieur, pour ainsi dire, de la révolution anglaise : c’est le procédé des peintres flamands appliqué à l’histoire. Ce mélange habile d’aventures et de traits de mœurs, d’anecdotes et de portraits, ne fait pas disparate et s’enchaîne à merveille sous la plume experte et brillante de l’écrivain. En France, cette histoire intime de la révolution anglaise était tout-à-fait inconnue : M. Philarète Chasles l’a curieusement recherchée dans tous les vieux monumens des annales britanniques, qui lui sont si familiers. La mosaïque qu’il a ainsi reconstruite avec amour forme un tableau qui, quoiqu’il soit très amusant, est profondément instructif. Le piquant ici n’ôte rien au sérieux de l’entreprise : on ne serait pas tenté de rire en apprenant des détails inconnus sur les amours de Danton ou sur les habitudes de Robespierre ! C’est ce genre d’intérêt qu’offre à un haut degré le Charles Ier de M. Chasles. Les récits de la vie publique y étant à chaque instant éclairés par les récits de la vie privée, on se trouve comme rapproché des acteurs et on devient un contemporain. L’ouvrage, exécuté avec luxe, est orné de ces belles gravures de Cattermole, qui ont coûté au célèbre peintre anglais tant de voyages et d’années. Cette illustration est, contre l’habitude, une véritable œuvre d’art, qui est justement célèbre au-delà du détroit, et qui mérite d’obtenir chez nous la même popularité.



V. de Mars.
  1. Voyage dans l’Inde et le golfe Persique par l’Égypte et la mer Rouge, par V. Fontanier, vice-consul de France à Bassora, seconde partie.
  2. Un volume grand in-8o, chez Janet, 59, rue Saint-Jacques.