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leur constitution nouvelle soit à l’abri de tout reproche ; néanmoins elle a été un progrès : elle attestait visiblement la pensée, comme le disait alors une circulaire ministérielle, de mettre les conseils en harmonie avec le caractère de nos institutions politiques. Une autre ordonnance a consolidé, en les étendant, les haïes des chambres de commerce, et tenté de raviver un peu les chambres consultatives des arts et manufactures, engourdies sous le régime énervant de l’arrêté de l’an XI. Si la mesure à l’égard de ces dernières chambres n’a pas eu de résultats bien marqués, la situation actuelle est cependant préférable à l’ancienne.

Un projet très curieux et connu de fort peu de personnes avait été élaboré, sous l’empire, pour réformer les chambres consultatives. La pensée de ce projet était émanée directement de Napoléon, dans un conseil des finances du 21 février 1806 ; l’empereur avait rapidement exprimé ses vues sur l’organisation industrielle : il voulait faire des chambres consultatives la clé de voûte d’un nouveau régime. L’idée du projet est libérale au fond ; cependant l’intention en fut méconnue par d’excellens esprits : on crut y voir un retour déguisé vers le système des anciennes corporations. Elle leur empruntait, il est vrai, certaines formes ; mais elle se retrempait dans le principe de la liberté du travail. Les évènemens empêchèrent l’empereur de suivre la réalisation de sa pensée, et ils emportèrent le projet à peine éclos. Je ne voudrais point conseiller de le reprendre aujourd’hui, du moins intégralement. La situation n’est plus la même ; ce projet pourrait seulement être consulté avec fruit, si on jugeait convenable de remanier l’organisation des chambres consultatives

L’attention publique se dirige en ce moment vers d’autres objets. En 1806, on songeait surtout à contenir ; sans perdre de vue la nécessité d’un frein, on doit se préoccuper davantage aujourd’hui d’améliorer les situations dans l’ordre moral et dans l’ordre matériel. Les mesures favorables aux classes ouvrières dont nous venons de parler répondent à cette tendance, qui s’est encore révélée tout récemment par quelques-unes des questions dont m. le ministre de l’agriculture et du commerce avait saisi les conseils-généraux convoqués auprès de lui. Refondre dans un esprit libéral les élémens épars de la législation sur les conseils de prud’hommes, fortifier l’action de la loi sur le travail des enfans en la dégageant de certaines difficultés pratiques, rechercher s’il serait possible de donner à la prévoyance des travailleurs de nouveaux stimulans et de nouvelles garanties, compléter les conditions légales du contrat d’apprentissage ébauchées par la loi du 22 germinal an XI : telles sont, si je ne me trompe, les intentions exprimées, intentions qui s’associent au sentiment général. Ce sont là des questions mises à l’étude, des questions ouvertes, pour emprunter au vocabulaire politique de l’Angleterre un mot qu’il serait bon d’introduire chez nous avec sa signification originelle et avec l’usage auquel il s’applique ; elles viennent s’ajouter aux projets de lois concernant l’industrie et le commerce portés déjà devant les chambres, comme à ceux qui ont été adoptés durant les années précédentes.

On le voit, l’action du gouvernement de juillet, en ce qui concerne l’organisation