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CÉLINDE.

C’est une horreur ! un morceau de chair taillé à coups de serpe !

FLORINE.

Quand je pense que madame, qui est si bien faite, s’est ensevelie toute vive dans un affreux désert par amour pour un petit jeune homme, assez joli, il est vrai, mais sans la moindre consistance…

CÉLINDE, effrayée.

Florine, Florine, regarde !

FLORINE.

Qu’y a-t-il ?

CÉLINDE.

Un crapaud qui est entré par la porte ouverte, et qui s’avance en sautelant sur le parquet.

FLORINE.

L’affreuse bête ! avec ses gros yeux saillans, il ressemble à faire peur à M. de Vaudoré.

CÉLINDE.

Je vais m’évanouir ; Florine, ne m’abandonne pas dans ce péril extrême.

FLORINE.

Où sont les pincettes, que je l’attrape par une patte, et que je le jette délicatement par dessus le mur ?

CÉLINDE.

Prends garde qu’il ne te lance son venin à la figure.

FLORINE.

Ne craignez rien, je suis brave. Nous voilà débarrassées de ce visiteur importun.

CÉLINDE.

Je respire. Dans les descriptions d’ermitages et de chaumières, les auteurs ne parlent pas de crapauds qui veulent se glisser dans votre intimité.

FLORINE.

Je l’ai toujours dit à madame, que les auteurs étaient des imbéciles. La campagne est faite pour les paysans, et non pour les personnes bien élevées.

CÉLINDE.

Grand Dieu ! une guêpe qui se cogne en bourdonnant contre les vitres ! Si elle allait me piquer !

FLORINE.

Avec deux ou trois coups de mouchoir, je vais tâcher de la faire tomber à terre, nous l’écraserons ensuite. (Elle tue la guêpe.)