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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 14.djvu/11

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DU PAMPHLET.




I. - ENTRETIENS DE VILLAGE, LES PAMPHLETS DE M. DE CORMENIN.
II. - LE PRÊTRE, ETC. - LE PEUPLE, PAR M. MICHELET.




Tacite ne nous a pas laissé ignorer que l’empereur Auguste n’aimait point ce que nous appelons aujourd’hui la liberté de la presse. L’heureux héritier de César voulut qu’on punît sévèrement ceux qui composaient de petits livres contre les particuliers. Il craignait sans doute qu’au moment où la tribune se taisait, la liberté et la malignité humaine ne cherchassent dans ces petits livres, libelli famosi, de trop cruels dédommagemens. En général, les anciens, pour qui les plus grandes licences de la harangue publique étaient une habitude et comme une émotion nécessaire, supportaient impatiemment d’être maltraités dans des écrits. Ils n’admettaient pas ces accusations auxquelles on ne pouvait répondre sur-le-champ, comme dans l’assemblée du peuple, au sénat ou devant les juges. Ils mettaient leur point d’honneur dans un échange direct de toutes les invectives, de toutes les violences de langage que leur suggérait la passion.

Nous avons pris le contre-pied de cette manière d’être : dans nos discours nous sommes plus retenus, et c’est dans nos écrits que nous mettons nos plus grandes malices. Il ne venait pas à l’esprit des orateurs antiques de s’interrompre pour se reprocher de n’être point parlementaires ; la parole tombait sur leurs têtes comme un glaive que rien ne