Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 14.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est curieux d’étudier par quel artifice plusieurs de ces animaux, presque entièrement dépourvus d’organes de locomotion, parviennent néanmoins à parcourir des centaines de lieues ; comment ils trouvent les moyens de se faire transporter par d’autres, comme la plupart des mollusques à ventouses, de se laisser entraîner par les courans des fleuves, comme les akis, les pimélies et un grand nombre d’autres insectes ; comment enfin plusieurs coquillages, tels que les argonautes et les nautiles, parviennent, avec leurs tentacules en forme de voiles, à parcourir des espaces de deux ou trois cents lieues.

Les migrations des végétaux et la faculté que la nature a donnée à leurs graines de parcourir d’énormes distances, les moyens que plusieurs emploient pour s’emparer du sol qui leur convient et en chasser les autres, ne sont pas moins féconds en curieux détails dont on ne tardera pas à retirer d’utiles applications. Le livre de M. Marcel de Serres, couronné par l’Académie des sciences de Harlem, a ouvert une voie large et nouvelle aux observations des naturalistes. Malgré le défaut de méthode que nous y avons parfois remarqué et l’impardonnable négligence avec laquelle il est écrit, ce livre mérite, par les faits nouveaux qu’il signale et les tableaux qui l’accompagnent, d’être consulté par ceux qui ne veulent point rester étrangers aux admirables lois qui président à la distribution et à l’histoire des races dans les diverses parties du globe.


A.B.


— On n’a pas oublié le remarquable travail publié dans cette Revue par M. le comte Alexis de Saint-Priest sur la dissolution de la société de Jésus, et où l’auteur, les pièces diplomatiques en main, éclairait d’une vive et piquante lumière des négociations long-temps restées mystérieuses. Ce travail est devenu un livre, et ce livre a eu sa destinée, habent sua fata libelli. Citée à la tribune, traduite en Angleterre et en Allemagne, adoptée tour à tour comme une apologie de la société de Jésus ou comme une arme contre elle, vivement critiquée par les uns, louée sincèrement par les autres, l’Histoire de la Chute des Jésuites a trouvé dans tous les camps de nombreux lecteurs et des lecteurs passionnés. Les violences de la polémique et le retentissement même du livre imposaient à l’historien des devoirs qu’il a compris. Pour qu’on ne se méprît pas sur ses intentions, sur le caractère d’une œuvre écrite, comme il le dit lui-même, sans amour et sans colère, sine ira et studio, il était désirable que le texte en fût soigneusement revu, que de nombreuses pièces justificatives vinssent à la fois compléter et appuyer les jugemens de l’écrivain. Tel est le but que l’auteur s’est proposé d’atteindre dans une nouvelle édition, et l’Histoire de la Chute des Jésuites se réimprime aujourd’hui pour la quatrième fois[1]. Après avoir servi de document dans une cause pendante, après avoir eu, pour ainsi dire, son rôle actif et son succès d’à-propos, l’ouvrage de M. de Saint-Priest garde ses titres à un succès plus calme et plus durable. C’est une page d’histoire dont l’intérêt survit à des émotions, passagères, et dont l’autorité s’est accrue de toutes les adhésions qu’a rencontrées l’auteur, de toutes les colères même qu’il a soulevées.


- L’Italie est en ce moment livrée à de curieuses recherches sur sa propre histoire. De tous côtés, on étudie, on restitue les anciennes chroniques ; on rend à

  1. Chez Amyot ; rue de la Paix.