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encore que d’un petit nombre d’années, elles n’en ont pas moins conduit déjà à des résultats intéressans. La différence de température entre les régions équinoxiales et les régions polaires engendre deux grands courans opposés. L’air, dilaté et rendu plus léger par la chaleur constante sous l’équateur, s’élève et gagne la surface de l’océan aérien. Là, il se déverse vers les pôles et en chasse l’air froid, qui, se précipitant vers le sol, tend à venir occuper la place restée libre et à se porter vers l’équateur. La différence de vitesse de rotation dont sont animés les points situés sous le pôle et sous l’équateur imprime à ces courans une sorte de torsion. Le courant équinoxial ou ascendant s’infléchit vers l’ouest. Le courant polaire on descendant s’infléchit vers l’est. Le souffle des cents vient ainsi en aide aux mouvemens de la mer pour courber les lignes isothermes et leur imprimer la tendance générale que nous avons signalée.

Les lignes isothermes représentent la température moyenne de l’année, mais cette moyenne peut résulter de la compensation existante entre des extrêmes très différens. La Hongrie et l’Irlande, par exemple, sont placées sur la même ligne isotherme de 9,5 degrés, et cependant à Bude la température du mois d’août s’élève jusqu’à 21 degrés, tandis que presque jamais elle ne dépasse 16 degrés à Dublin. En revanche, les hivers sont infiniment plus doux aux environs de cette dernière ville. A mesure qu’on pénètre dans l’intérieur de notre continent, ces différences entre les deux saisons se prononcent davantage, et de là résultent ces climats à variations très considérables que Buffon a si justement nommés climats excessifs. Dans l’intérieur de l’Asie, Tobolsk, Barnaoul et Irkoutsk ont les mêmes étés que Berlin, Munster et Cherbourg. À cette époque, le thermomètre se maintient quelquefois des semaines entières à 30 ou 31 degrés au-dessus de zéro ; mais à ces étés succèdent des hivers dont la température moyenne est, d’après M. de Humboldt, de 18 à 20 degrés au-dessous de zéro, et pendant lesquels ou voit parfois le mercure geler naturellement, ce qui suppose un froid d’au moins 40 degrés.

En considérant isolément l’été et l’hiver de tous les points du globe, en prenant la température moyenne pour ces deux saisons, en réunissant ensuite les points où ces moyennes opposées sont égales, on obtient des lignes d’égale température d’été et d’hiver, appelées par M. de Humboldt lignes isochimènes et lignes isothères. D’après ce que nous venons de dire, on comprend qu’elles ne peuvent coïncider avec les lignes isothermes correspondantes. Elles ne sont même pas parallèles à ces dernières et les coupent au contraire en divers points déterminés par leurs propres ondulations. Cependant l’inégalité de température entre l’été et l’hiver ne franchit jamais certaines limites dans chaque ligne isotherme,