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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 14.djvu/991

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unes offrent des figures en grand nombre d’objets animés ou inanimés ce sont celles qui recouvrent, les murs des monumens publics, sacrés ou profanes ; d’autres qui se rencontrent sur des manuscrits que l’on retrouve dans tous les tombeaux, à côté des restes humains auprès desquels ils ont évidemment été placés à dessein, offrent des signes d’une exécution plus rapide, plus expéditive et bien moins soignée : ce sont des caractères cursifs très probablement. Cependant, après avoir reconnu que ces manuscrits sont l’éternelle reproduction d’un seul et même écrit, ce qui lui fait supposer qu’il s’agit d’un rituel funéraire et religieux, le savant reconnaît que dans ces manuscrits il en est qui sont conçus en écriture identique avec l’écriture monumentale : il se hâte de comparer les textes ; des représentations de scènes funéraires ou religieuses le guident ; il retrouve des passages qui doivent comporter le même sens ; il examine avec soin, et bientôt il reste convaincu que la seconde écriture n’est qu’une véritable tachygraphie de la première, et qu’elle représente des mots du même dialecte. Je dis du même dialecte, parce que le témoignage d’un Français dont les œuvres ont malheureusement péri, mais dont quelques passages ont été conservés dans des livres écrits en d’autres pays, lui apprend qu’en France il y avait une langue parlée par les castes sacerdotales et nobiliaires, et une langue parlée par le peuple et comprise par tout le monde.

Reste une troisième écriture française qui n’offre plus aucune image d’objets animés ou inanimés, et qui semble au contraire constituer une écriture alphabétique. Or, il existe entre les mains du savant un texte antique qui lui apprend que les Français ont eu trois écritures, la première destinée aux usages sacrés, et dans laquelle, concurremment avec des symboles et des emblèmes, on employait des signes alphabétiques obtenus à l’aide de figures d’objets animés ou inanimés auxquels il fallait attribuer la valeur de la première articulation de leur nom français. La deuxième, n’étant qu’une simple tachygraphie de la première, était employée par les moines et les savans pressés d’économiser leur temps et de s’affranchir de la nécessité de dessiner avec soin des hommes, des animaux, des ustensiles. La troisième écriture, beaucoup plus simple que les deux autres, et pour cela même mise à la portée de tous, était réservée aux transactions les plus vulgaires, aux usages les plus humbles, aux correspondances, par exemple.

A l’aide de ces premiers renseignemens, le savant se met courageusement à l’œuvre : il fait des efforts inouis pour déchiffrer quelque chose ; mais, hélas ! il n’a rien trouvé, absolument rien, lorsqu’un beau jour on lui apporte de France la copie d’une triple inscription conçue en trois écritures différentes. Dans la première partie, il reconnaît l’écriture sacrée, dans la deuxième l’écriture vulgaire, dans la troisième enfin il retrouve une langue et une écriture qu’il connaît parfaitement ; il s’empresse