va demander un nouveau succès. M. Ampère revient d’Égypte, et on sait déjà quelle précieuse moisson il en rapporte. A côté de ces nouveautés sérieuses s’offrent d’intéressantes réimpressions. M. Cousin donne une forme nouvelle et définitive à ces leçons dont l’influence est restée si féconde, et dont il nous rend, encore agrandi, le majestueux ensemble. En littérature comme en philosophie, notre époque a de brillans souvenirs qu’elle aime à évoquer. Nous nommerons, entre autres, une heureuse et discrète application du cadre romanesque à l’histoire, le Cinq-Mars de M. de Vigny, qui vient d’être réimprimé pour la neuvième fois ; l’essai sur le Dix-huitième siècle en Angleterre, de M. Chasles, et les Portraits littéraires de M. Sainte-Beuve, deux ordres de travaux que nous aurions mauvaise grace à louer ici, devant des lecteurs qui ne les ont pas oubliés.
En Angleterre, l’avantage appartient pour le moment à cette littérature essentiellement pratique et d’un caractère tout spécial, qui se compose non-seulement de récits de voyages, mais de toute espèce de compilations et de documens. Dans cette dernière catégorie se range une vaste publication, qui sera bientôt dans cette Revue l’objet d’un travail approfondi. La correspondance de l’amiral Nelson éclaire à la fois d’une vive lumière les derniers triomphes de la marine britannique et l’histoire générale des marines européennes. — Quant à l’armée des touristes, loin de diminuer, elle se fortifie sans cesse, et voit même des romanciers comme Charles Dickens passer dans ses rangs. A la relation de son voyage en Amérique a succédé le récit d’un tour en Italie. Si la littérature d’imagination compte encore au-delà du détroit quelques productions aimables, ce sont des exceptions bien rares qui ne font que mieux ressortir la stérilité régnante. L’Amérique n’est guère plus heureuse : de temps en temps seulement Cooper se réveille. Le titre de son dernier roman, Ravensnest ou les Peaux Rouges, indique un retour à ces tableaux de la vie indienne qui firent le succès de ses premiers écrits. La littérature américaine a des intermittences d’activité plutôt qu’une vie régulière et continue.
Ce ne sont pas les forces littéraires qui manquent à l’Allemagne, c’est l’ordre, c’est l’unité. Les imaginations sont égarées ; elles cherchent leur voie, mais elles luttent avec courage. En présence des tâtonnemens de la poésie et du roman, l’érudition germanique a gardé les belles qualités qui font sa force ; elle trouve parmi les poètes mêmes d’illustres auxiliaires. Uhland publie en ce moment un travail précieux sur l’ancienne poésie allemande, et Rückert, dans le recueil lyrique intitulé Hamâsa, applique son imagination flexible à traduire, à commenter les poésies populaires des Arabes. — Ce sont là de nobles exemples, et il nous a paru intéressant de constater cette nouvelle situation des lettres dans trois grands pays avant d’aborder l’analyse des publications récentes.
II. — Briefe Schillers und Goethes an W. Sehlegel (Lettres de Schiller et de Goethe à G. Schiegel.[2]
L’héritage littéraire de M. Schlegel est en ce moment l’objet d’un de ces dépouillemens minutieux où brille la patience plutôt que le tact de la critique