à Berlin par une orthodoxie dirigeante les mêmes thèses que cette coterie qui se dit opprimée soutient ici chaque jour avec plus d’audace. L’analogie est frappante, et, s’il est essentiel d’en tenir compte pour saisir l’histoire du parti évangélique qui aspire à régenter l’Allemagne, il ne faut pas non plus l’oublier, si l’on veut avoir l’intelligence générale de tous nos troubles religieux d’à présent. On a fait grand bruit du retour de l’Angleterre au catholicisme, et l’on a grossi tant qu’on a pu ces nouvelles variations de l’église protestante : les caprices de l’érudition et les fantaisies de la mode aristocratique y prennent pourtant plus de place qu’on n’a daigné le dire, et toute cette réaction est de nature trop élégante, trop-exquisite, pour devenir très populaire. L’évangélisme prussien s’est comporté, depuis quelques années, de manière à provoquer des espérances de même sorte, et l’on a cependant beaucoup moins attiré l’attention publique de ce côté-là ; c’est peut-être que ces rudes Allemands allaient trop vite en besogne, et, suivant l’expression de Montaigne, enfonçoient trop le sens des choses. Il est temps de réparer cet injuste silence et de révéler aux gazettes évangéliques que nous avons chez nous cette parenté trop négligée qui les unit à la pieuse Gazette de Berlin.
Et d’abord M. Hengstenberg, occupé de la lutte personnelle qu’il a engagée contre le rationalime, ne sait comment faire assez d’avances aux catholiques pour les amener avec lui sur le champ de bataille et se couvrir de leur armure contre l’ennemi commun. Luther, en ces temps-ci, a rêvé qu’il pourrait bien être pape tout comme le pape de Rome, ont il avait dit tant de mal, et c’est Rome, c’est l’esprit de Rome qu’il invoque contre ceux qui ne veulent pas lui laisser ceindre la tiare. Bel exemple des confusions du siècle ! L’église évangélique vient donc avouer son indigence par la bouche de ses plus fiers docteurs ; elle est pauvre en poésie, pauvre en solennités ; l’art et l’imagination lui manquent, la dévotion en souffre ; elle rend pleine justice aux mérites efficaces du catholicisme et repousse de son sein quiconque les méconnaît ; elle se dit elle-même toute catholique ; le protestantisme n’est qu’un mot creux ! On vit à côté de l’église-mère, on ne saurait vivre en révolte contre elle ; il n’y a plus aujourd’hui que deux églises sœurs, nourries sur le même fonds et défendant les mêmes autels ; on s’entendrait presque pour y célébré un même culte. Entre autres sujets de rancune contre M. Ronge, on ne lui pardonne pas d’avoir dénigré la sainte tunique. « Avait-il quelque chose de meilleur à mettre à la place ; et ne vaut-il pas mieux se rapprocher du Christ par les sens que de ne point s’en rapprocher du tout ? » N’est-ce pas de très mauvais goût d’attaquer les pèlerinages, et sied-il à de vrais chrétiens de les condamner au nom des intérêts matériels ? « C’est uniquement ressembler à Pharaon, qui refusait aux Juifs la permission de servit