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catholique, — et tout y pousse, — la coalition peut perdre en un jour tout le terrain qu’elle a gagné depuis 1841.

Je n’exagère pas. Un rapide exposé des fluctuations survenues dans la politique commerciale de la Belgique dira par quel enchaînement de concessions forcées, mais courageusement subies, les catholiques, seuls adversaires sérieux de notre alliance, en sont venus à poser les bases d’un système d’expansion douanière dont l’union franco-belge est l’inévitable complément.


II.

La politique commerciale de la Belgique est en général mal comprise, mal jugée. On a cru voir long-temps dans les contradictions douanières de ce pays l’incertitude bien naturelle d’un peuple nouveau hésitant dans le choix de ses alliés, redoutant surtout une alliance exclusive, qui l’eût rivé à l’un de ses voisins en le détachant des autres : c’est une erreur. Si le gouvernement belge a affiché le premier de ces scrupules dans ses rapports avec les gouvernemens étrangers, si la minorité libérale a chaudement épousé le second, repoussant en détail la France, l’Allemagne et la Hollande, au risque d’arriver par ces répulsions successives, non pas à l’équilibre des alliances, mais à l’isolement absolu, l’idée fixe du parti dominant, celle qui a dirigé, de 1831 à 1844, tous les actes internationaux, celle qui a servi de base au système des droits différentiels, n’était rien moins que la séquestration continentale de la Belgique, avec la mer pour issue, l’Amérique pour marché. Les agressions dirigées isolément par le tarif belge contre la Hollande, l’Allemagne et la France, agressions que les deux puissances non lésées interprétaient tour à tour en leur faveur, émanaient en réalité d’une pensée hostile à chacune d’elles, et cette pensée perce clairement dans la loi des droits différentiels, produit hétérogène d’une coalition d’intérêts rivaux, mais séparément ameutés contre l’un ou l’autre pays. C’est là un point capital. La solidarité de griefs qui unissait ici, à leur insu, la Hollande, l’Allemagne et la France, une fois démontrée, toute dérogation, même partielle, au système qui la consacrait implique une solidarité de réparations ; les victoires remportées par chacun de ces pays sur la coalition protectionniste belge profitent, en principe, à tous trois ; les traités conclus par la Belgique avec l’Allemagne et la Hollande deviennent j)0ur l’union franco-belge bien moins un obstacle qu’une facilité. La Hollande et l’Allemagne sont donc inséparables de la France dans l’appréciation du rôle que celle-ci est appelée à jouer entre les intérêts belges, et peut-être entre les partis. J’examinerai, en premier lieu, quels élémens chacune de ces