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placés par Nelson sous les ordres de Troubridge ; Schipani avait été battu par la bande indisciplinée de Sciarpa, Bassetti par les troupes de Mammone et de Frà Diavolo, Spano par les paysans de la Pouille, Manthonè par les Calabrois du cardinal Ruffo. Naples seule et quelques points fortifiés reconnaissaient encore l’autorité de la république. Dès qu’il fut instruit de ces événemens, Nelson se disposa à conduire son escadre devant Naples ; mais une nouvelle inattendue vint suspendre son départ. Bruix, trompant la surveillance de lord Bridport, avait franchi le détroit de Gibraltar, et remontait la Méditerranée avec la flotte de Brest, composée de 25 vaisseaux de ligne. L’escadre de l’amiral Keith, courant où le danger était le plus pressant, s’était lancée à sa poursuite, le 20 mai 1799, elle se réunissait devant Mahon, sous les ordres du comte de Saint-Vincent, à la division du contre-amiral Duckworth. Ce mouvement dégageait la flotte espagnole mouillée à Cadix, et l’amiral Mazarredo, pressé d’opérer sa jonction avec la flotte française, en profita pour appareiller avec 17 vaisseaux de ligne, dont 6 à trois ponts. Le jour même où 20 vaisseaux anglais mouillaient a Mahon, l’amiral espagnol arrivait devant Carthagène. Malheureusement cette traversée de Cadix à Carthagène avait suffi pour réduire la flotte espagnole à l’impuissance. 11 vaisseaux sur 17 avaient été en partie démâtés par un coup de vent que la flotte anglaise avait également essuyé sans en éprouver aucun dommage Bruix, à qui on prêtait le projet de se rendre en Égypte pour en ramener l’armée et Bonaparte, venait de reprendre la mer, et le comte de Saint-Vincent, plus souffrant que jamais avait remis à l’amiral Keith le commandement de la flotte anglaise. Ce dernier, rallié sous le cap Saint-Sébastien par cinq vaisseaux de ligne détachés de la flotte de la Manche, songea d’abord à mettre l’escadre de Nelson à l’abri d’une surprise : après lui avoir expédié le contre-amiral Duckworth avec 4 vaisseaux, il se dirigea sur Toulon dans l’espoir d’y obtenir quelques renseignemens sur la route qu’avait prise l’amiral Bruix.

La gravité des circonstances vint arracher Nelson aux funestes délices de Palerme ; il rappela près de lui le capitaine Troubridge, et le capitaine Ball, qui bloquait Malte avec deux vaisseaux. Rallié bientôt par l’amiral Duckworth, il se trouva à la tête de 16 vaisseaux de ligne, dont 3 vaisseaux portugais. Avec cette escadre, Nelson s’établit en croisière à la hauteur de Maritimo, sur le passage présumé de la flotte française. Il pouvait occuper cette station sans péril, car les événemens avaient obligé l’amiral Bruix à modifier ses premiers desseins : le projet de se rendre en Égypte devenait impraticable après les avaries qu’avaient éprouvées les vaisseaux espagnols. Bruix, ne pouvant plus se porter sur Alexandrie, résolut de ravitailler le corps de Moreau, dont il connaissait la détresse, et de secourir Gênes et Savone, menacées d’être investies par