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et usera de l’acier pour 100,000 francs, sans parler du fer. Enfin les capitaux, lorsqu’on est forcé d’avoir recours à ceux d’autrui, ne s’obtiennent qu’à des conditions très dures. Autrefois, au Mexique, le clergé, qui administrait de grandes richesses, les confiait aux hommes industrieux sans jamais en exiger plus de 6 pour 100. Lorsqu’en 1828, d’aveugles passions politiques et les suggestions perfides d’une puissance étrangère eurent fait porter la loi qui chassait du territoire mexicain tout ce qui était natif de la Péninsule, 70,000 personnes environ durent émigrer, et elles emportèrent une très grande partie de la richesse mobilière du pays. L’exil de ces négocians, magistrats, agriculteurs, membres du haut clergé, qui formaient l’élite de la nation, a rompu le lien vivant qui rattachait la population mexicaine aux nations civilisées, et n’a pas peu contribué à livrer le pays à l’anarchie qui le ronge ; c’est par là aussi qu’on a tari la source de beaucoup d’entreprises utiles en enlevant aux mineurs la ressource du crédit. L’apport des compagnies anglaises de 1825 n’a point comblé cette lacune. Il faut payer aujourd’hui 18 ou 24 pour 100 le loyer des capitaux.

Ce n’est pas qu’on ne puisse citer des perfectionnemens obtenus au Mexique dans l’industrie minérale. Ainsi, quand je compare ce que j’ai vu à Real del Monte avec la description qu’a donnée des mêmes mines un observateur consciencieux et éclairé venu cinq années après, M. I. Lowenstern, je suis frappé du changement qui s’était opéré dans l’intervalle. Real del Monte lui offrit un spectacle qui, sous plusieurs aspects, ressemblait à celui d’une exploitation à l’anglaise. Des améliorations importantes ont été réalisées dans les ateliers de Guadalupe y Calvo et sur quelques autres points ; mais ce sont des phénomènes locaux et restreints. Il a fallu que l’influence étrangère régnât sans partage dans les mines que je viens de nommer, et qu’elle y fît des efforts surhumains. Real del Monte, d’après le récit de M. Lowenstern, n’était pas seulement alors une mine exploitée par le capital anglais ; c’était, par le personnel même, une colonie britannique. Tout ce qui n’était pas simple ouvrier mineur était anglais. A Guadalupe y Calvo, c’étaient des Anglais, des Français, des Allemands, qui avaient la haute main, et ils faisaient de leur mieux. Malheureusement ils n’avaient aucun moyen de changer les faits généraux qui enchérissent extrêmement l’exploitation, tels que l’absence des voies de communication et l’ignorance crasse de la population. Dans l’industrie des mines, tout ce qui est mexicain continue de suivre les anciens erremens, semblable à ces quadrupèdes renommés pour leur opiniâtreté, qui, en descendant les sentiers des montagnes qu’ils sont dressés à parcourir, posent invariablement le pied sur la même saillie du roc ou dans le même trou[1].

  1. Comme il n’y a pas de règle sans exception, je signalerai ici, d’après M. Duport, comme animé de l’amour des améliorations, M. Anitua, mineur mexicain fort recommandable qui a établi au Fresnillo la hacienda nueva, immense usine d’amalgamation dont les dispositions sont fort remarquables.