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LISBONNE


LA COUR DE DOÑA MARIA ET LES DERNIERS EVENEMENS


DU PORTUGAL.




I.

En creusant à l’embouchure du Tage une rade vaste et profonde, la Providence avait marqué la place d’une grande ville maritime. Devenue la capitale d’un royaume conquis pied à pied sur les Maures par les chevaliers chrétiens, Lisbonne accomplit sa double destinée : elle fut commerçante comme Gènes et guerrière comme Venise. La nation portugaise, contrainte par le voisinage de l’Espagne, qui l’isolait de l’Europe, à s’étendre sur les mers, s’épuisa en conquêtes, en expéditions aventureuses ; elle se dissémina sur tous les points du globe, au préjudice de la patrie. Le Tage était la route par laquelle les héros que chanta Camoens et qui étonnèrent le monde s’élançaient vers des plages inconnues ; le Portugal tout entier obéissait à cette impulsion, et Lisbonne, orgueilleuse de ses flottes, s’étendait au bord des eaux comme pour mieux les protéger. Les temps sont loin où la bannière des rois de la seconde dynastie se déployait victorieusement sur toutes les mers ; mais ces souvenirs glorieux vivent encore dans les monumens religieux et militaires restés debout aux abords de la capitale : ils en sont le plus bel ornement. Le voyageur qui vient de franchir les hautes vagues déferlant à grand bruit sur les sables de la barre salue avec respect