Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/822

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui serait ouvert, un document officiel[1] répondra : Les deux départemens du Var et des Bouches-du-Rhône présentent une étendue de bois de 343,502 hectares, appartenant à l’état, aux particuliers, aux communes, et la plupart aussi négligés que ceux de la Ciotat ; ils contiennent en outre, déduction faite du territoire de la Crau, dont on peut faire quelque chose de mieux, 247,772 hectares de landes, de bruyères et de pâtis. Ces surfaces sont désertes : réunies, elles égalent, à 16,611 hectares près, celles des départemens de la Seine et de Seine-et-Oise ; le terrain n’en est pas plus mauvais que celui de la forêt de Fontainebleau, et, si elles rendaient proportionnellement autant de bois de chauffage et de construction, il n’en faudrait pas davantage pour doubler notre navigation sur la Méditerranée.

De semblables résultats ne s’obtiennent qu’avec une persévérance qui, s’il faut le dire, se concilie encore moins avec l’esprit de nos institutions politiques qu’elle n’est dans le caractère de notre nation. Les entreprises susceptibles de s’exécuter rapidement sont en France les seules sur le succès desquelles il soit toujours permis de compter, et il est prudent de demander an développement des communications une partie des avantages que le reboisement nous ferait long-temps attendre. Ouvrir des routes, c’est condenser l’espace sur les territoires qu’elles traversent ; rapprocher les ressources des pays éloignés, c’est, presque en créer sur les lieux qu’il s’agit d’approvisionner. On voit, dans la correspondance relative au siège de Toulon en 1707[2], que deux difficultés capitales entravèrent toutes les opérations du maréchal de Tessé ; c’étaient celle de faire arriver en ligne, au travers de montagnes impraticables, les troupes qui se trouvaient dans le haut Dauphiné, et celle de les alimenter. Si des routes parallèles aux Alpes étaient descendues des bassins du Drac, de la Durance et du Verdon vers la côte, il est probable que l’armée du prince Eugène eût été coupée et détruite, ou plutôt ce grand capitaine, ne sentant pas ses mouvemens couverts sur sa droite, eût renoncé d’avance à son entreprise. La route, aujourd’hui fort avancée, de Grenoble à Antibes par Sisteron, Digne et Grasse eût délivré le maréchal de Tessé de bien des inquiétudes ; mais elle ne répond pas à tous les besoins de la défense et de l’approvisionnement de la côte, et le service devrait en être complété par deux nouvelles lignes se dirigeant, l’une de Toulon vers l’embouchure du Verdon dans la Durance et Manosque, l’autre de Draguignan vers Castellane et le haut de la vallée du Verdon.

La dernière agrandirait beaucoup l’aire territoriale du port de Fréjus et mettrait en valeur la partie la plus reculée des Basses-Alpes ; elle

  1. Statistique de la France publiée par le ministère du commerce. I. R. 1840.
  2. Collection de Provence, année 1707. (B. R. Mss.)