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LYDIE


Calaïs, ma richesse unique,
Est plus beau qu’un soleil levant,
Et toi plus léger que le vent,
Plus prompt à t’irriter que l’âpre Adriatique.
Et pourtant près de toi, si c’était ton plaisir,
Volontiers j’irais vivre, et volontiers mourir.






V.


Par un mauvais temps


Avril 1847

Elle a mis, depuis que je l’aime,
(Bien long-temps, peut-être toujours),
Bien des robes, jamais la même ;
Palmire a dû compter les jours.

Mais, quand vous êtes revenue,
Votre bras léger sur le mien,
Il faisait, dans cette avenue,
Un froid de loup, un temps de chien.

Vous m’aimiez un peu, mon bel ange,
Et, tandis que vous bavardiez,
Dans cette pluie et cette fange
Se mouillaient vos chers petits pieds.

Songeait-elle, ta jambe fine,
Quand tu parlais de nos amours,
Qu’elle allait porter sous l’hermine
Le satin, l’or et le velours ?

Si jamais mon cœur désavoue
Ce qu’il sentit en ce moment,
Puisse à mon front sauter la boue
Où tu marchais si bravement !


ALFRED DE MUSSET.