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abords étaient presque tous enfouis sous les éboulemens de la montagne, ne reconquirent toute leur célébrité que le jour où l’intrépide Belzoni tourna vers eux l’attention de l’Europe, en découvrant le plus beau de tous, celui du père de Ramsès-le-Grand, de Séthos, qui a élevé la salle gigantesque de Karnac. Ainsi ce nom se trouve écrit à Thèbes sur le plus grand édifice et dans le plus magnifique tombeau.

Vingt et un tombeaux ont été retrouvés. Strabon dit que, de son temps, on en connaissait quarante. Nous en sommes donc seulement à la moitié des découvertes qu’il est permis d’espérer. Il y a, je crois, beaucoup à attendre de la vallée adjacente où étaient les Pharaons de la dix-huitième dynastie, et où l’on n’a encore trouvé que le tombeau d’Aménophis-Memnon et celui d’un de ces rois qui adoraient le soleil sous l’emblème d’un disque dont les rayons sont terminés par des mains. Ces rois eux-mêmes, on le sait, viennent s’intercaler dans la dix-huitième dynastie, sur les autres monumens de laquelle leurs propres monumens tranchent d’une manière si remarquable par le type physique des personnages, presque semblables à des femmes, et par le caractère de l’art plus libre et plus vivant qu’il ne l’est nulle part en Égypte. Il y a donc encore là de belles trouvailles à faire. J’étais saisi d’une véritable émotion en contemplant ces rocs arides et en me disant que dans leur intérieur, séparées de moi peut-être par quelques pelletées de pierres et de débris, étaient d’immenses salles remplies de peintures, couvertes d’hiéroglyphes ; que dans ces ténèbres inexplorées se cachaient encore peut-être les enseignemens les plus curieux et les plus merveilleux spectacles. Heureux qui, pénétrant dans ces ombres, pourra dire : Que la lumière soit !… Et la lumière sera, et un monde sortira de la nuit.

Cet enthousiasme fera peut-être sourire le lecteur, mais il le partagerait, j’en suis sûr, s’il venait comme moi de pénétrer successivement dans une douzaine de ces prodigieux tombeaux. Plus tard je dirai quelque chose de chacun d’eux ; aujourd’hui je n’en décrirai aucun en particulier, mais je voudrais communiquer, autant qu’il est possible, le sentiment d’admiration et d’étonnement dont le premier coup d’œil m’a rempli. En pénétrant dans l’intérieur d’un tombeau royal, on trouve en général une pente, tantôt douce, tantôt rapide, quelquefois même escarpée. Le nom du Pharaon est écrit près de l’entrée. Des deux côtés du corridor incliné, d’immenses inscriptions hiéroglyphiques se déroulent sur les murailles ; à droite les lignes marchent dans un sens, à gauche elles marchent dans le sens opposé ; de sorte que la lecture de ces inscriptions dont l’étendue représente des volumes, peut se faire en descendant dans la demeure funèbre et en remontant de ses profondeurs vers la lumière du jour. Ces volumes d’hiéroglyphes ne se déchiffrent pas encore couramment, il s’en faut ; mais on voit que ce sont des prières semblables à celles qui se lisent sur les papyrus funéraires et