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libraires, les poètes à la recherche d’un éditeur, les vaudevillistes qui travaillent à faire recevoir leurs premières pièces. Les petits journaux ont, dans ces derniers temps, enfanté les petits livres, recueils anecdotiques et satiriques dont l’avènement dans notre littérature est marqué par l’apparition des Guêpes, qui obtinrent beaucoup de succès, car le succès ne fait jamais défaut à l’esprit. Les Guêpes à leur tour ont enfanté, vu l’accueil qu’elles ont reçu, toute une famille de productions éphémères, aujourd’hui justement oubliées.

La littérature, comme la politique, a été représentée par de nombreux organes périodiques ; ces sortes de journaux, en général plus calmes, plus mûris que les feuilles quotidiennes, sont de nature à exercer l’influence la plus salutaire sur les destinées du pays, dont ils représentent la civilisation dans toutes ses nuances : « Les hommes qui se préoccupent de l’avenir, a dit Henri Fonfrède[1], doivent exciter par leur avis ou leur exemple ces publications d’intérêt littéraire, politique et moral, où les jeunes talens peuvent développer les germes de leurs dispositions naturelles, poser les bases de leur réputation d’hommes, et conquérir dès le début des titres à la confiance du pays ; car, au grand jour de la presse, les réputations factices avortent, les louanges de complaisance s’éteignent, et, pour peu que la lutte publique continue, chacun est bientôt mis à sa place. » Le célèbre publiciste bordelais a de tout point raison ; mais des difficultés si nombreuses et si diverses viennent entraver les publications de ce genre, qu’il est plus aisé de constater des tentatives que des succès. Les revues, qui remplacent aujourd’hui les magasins, les archives littéraires, les bibliothèques, les décades, sont d’origine anglaise. Une autre importation britannique, mais moins littéraire et moins sérieuse, s’est implantée parmi nous ; nous voulons parler des feuilles hebdomadaires illustrées, qui forment une branche importante dans ce que nous appellerons la littérature des grands enfans et qui placent la propagation des idées ou des doctrines littéraires sous la protection des rébus et de la vignette sur bois. Mentionnons encore les journaux de théâtres et les journaux de salons, feuilles éphémères qui naissent sans cesse pour mourir après quelques numéros, et qui, trouvant toujours des rédacteurs sans trouver jamais d’abonnés, si ce n’est parmi les acteurs empressés de se faire louer, vivent comme les enfans prodigues de l’héritage paternel, et se perpétuent depuis quinze ans sous les titres les plus divers. Avec les journaux de théâtres et les journaux de salons, nous avons les journaux d’enfans, filles ou garçons, puis les journaux des femmes. Viennent ensuite, après les recueils destinés aux différens âges et aux différens sexes, ceux qui s’adressent aux diverses classes, aux divers goûts, aux diverses professions[2].

  1. Œuvres de Henri Fonfrède, tom. III, pag. 286.
  2. C’est ainsi que nous trouvons pour les célibataires le Messager des Mariages ; pour les musiciens le Sabbat musical, la Mélomanie, le Monde musical ; pour les gens de loi, outre le Droit et la Gazette des Tribunaux, le Journal des Huissiers, le Journal des Avoués, le Journal des Notaires ; pour les militaires la Sentinelle de l’armée ; pour la milice citoyenne le Garde national ; pour le clergé le Journal des prédicateurs, les Annales de l’archiconfrérie du Sacré Coeur de Marie, rue Notre-Dame des Victoires (à la sacristie) ; pour les gourmets le Gastronome ; pour les marins la Flotte ; pour les commerçans le Journal des Faillites, le Journal des Usines, le Journal des Tissus, le Garde-Meuble, journal d’ameublement, le Journal des Nouveautés, etc.