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LE CHATEAU


DE LUCIENNES.




Le plus beau ciel de printemps dorait la campagne le jour où nous allâmes à Saint-Germain, pour nous rendre ensuite au pavillon de la célèbre et malheureuse comtesse Du Barri, dernière favorite de Louis XV. La végétation brisait les nœuds de l’hiver ; des couleurs, des nuances sans nombre, des senteurs nouvelles, éclataient dans l’air inondé de lumière. Sur la route de Saint-Germain à Luciennes, nous fîmes involontairement un rapprochement facile entre cette nature si jeune, si fraîche et si riante, pleine de sève et d’abandon, et les jeunes années, le printemps de cette femme dont nous allions visiter la demeure. Sa fortune eut d’abord ce vif éclat, ces tendres reflets, cette étourderie, ce sourire universel et cette adorable vulgarité. Elle fut un peu à tout le monde comme le printemps ; elle fut surtout à qui l’aima.

Le château de Luciennes, qu’il faut distinguer du pavillon Du Barri, quoiqu’ils soient l’un et l’autre dans la même propriété, se trouve placé à l’une des extrémités du village de Luciennes, le plus fantasque des villages. Il est presque aussi grand que Versailles, il ne lui manque que des rues et des maisons pour être une ville de second ordre ; mais je crois qu’il les attendra long-temps.

Il n’est pas facile de connaître l’origine et surtout le sens de ce nom de Luciennes ou de Louveciennes. Dans le IXe siècle, ce village prend,