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« Mais en quoi ces messieurs se trompent, certainement, c’est sur le mauvais vouloir qu’ils me prêtent. Je n’ai pas approuvé l’entreprise, mais je n’ai rien fait pour lui nuire. Appellerait-on mauvais vouloir d’avoir refusé des soldats pour exécuter les travaux de l’union ? C’était dans l’intérêt même de l’expérience ; je voulais qu’elle fût concluante, elle ne l’aurait pas été si l’armée eût fait ce que les associés devaient faite par la puissance de l’organisation. J’en dirai autant des secours que l’union attend du gouvernement : s’ils sont autres que les 150,000 francs promis pour les travaux publics, ils affaibliront la foi dans le mérite de la méthode.

Ces messieurs assurent qu’ils n’ont rien touché des 150,000 francs. C’est doublement fâcheux pour eux, car, outre qu’ils sont privés de cette ressource, cela prouve qu’ils n’ont pas rempli les obligations qui correspondaient à ce secours, et qui en étaient la condition. Ce n’est pas une marque de progrès.

« Je ne relèverai pas ce que l’on peut trouver d’inconvenant dans le style de militaires s’adressant à un général qui a conduit l’armée d’Afrique au succès pendant six ans, et qui précédemment avait honoré le drapeau français sur tous les champs de bataille de l’Europe. C’est là un des tristes signes de l’époque. Plaise à Dieu, pour le bien de la patrie, que ce mal ne fasse pas de progrès dans l’armée, et qu’il reste circonscrit dans les quelques amours-propres que j’ai eu le malheur de blesser uniquement dans des vues d’intérêt public et non par le sentiment mesquin qu’on me prête !

J’ai l’honneur, etc.

« Maréchal Bugeaud

« Duc d’Isly. »




Essai sur la médecine dans ses rapports avec l’État, par M. F. C. Markus, médecin ordinaire de sa majesté l’impératrice de toutes les Russies. Saint-Pétersbourg, 1847. — Le sujet que s’est proposé de traiter l’auteur de ce livre est à la fois des plus importans, des plus vastes et des plus difficiles. Ici tout ou presque tout est à faire. L’intervention de la médecine dans l’économie politique peut seule amener la solution de bien des problèmes relatifs à la conservation, au bien-être, au progrès de la société humaine, et pourtant la médecine publique ou politique n’existe pour ainsi dire pas, même chez les nations les plus civilisées. Les notions hygiéniques pratiques, si utiles à répandre, et qui devraient faire partie de l’instruction primaire, sont réservées aux médecins de profession. Si nos capitales ou nos grandes villes de province comptent de nombreux médecins dignes de ce nom, si elles possèdent des hôpitaux vastes et admirablement organisés, nos populations rurales sont presque entièrement abandonnées à elles-mêmes et livrées à l’exploitation des charlatans de bas étage. Enfin on peut dire d’une manière générale que la plupart des questions d’utilité publique, relevant le plus immédiatement de la médecine, sont résolues par des administrateurs, des architectes et des agens voyers.

Toutefois, nous sommes heureux de le dire, après la lecture de l’ouvrage de M. Markus, la France est encore l’état où les lacunes et les anomalies de l’organisation médicale sont le moins choquantes. L’Allemagne, l’Angleterre, présentent sur ce point des faits bien autrement étranges. En France, par exemple, nous n’avons pu encore parvenir à nous défaire de cette institution bâtarde et