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Cela fût-il vrai, et tout à l’heure nous verrons ce qu’on doit en rabattre, il n’en faudrait pas moins que M. Garnier-Pagès reconnût avec nous, comme une incontestable vérité, que, de tous les gouvernemens qui, depuis soixante ans, ont régné sur la France, le gouvernement de juillet serait encore le moins coûteux. Sa succession nous pèserait moitié moins que celle de la restauration ; l’empire, avec ses deux milliards de charges, nous coûterait trois fois plus cher, et la république elle-même, l’ancienne république, malgré le soin qu’elle a pris de ne consolider que le tiers de ses dettes, nous reviendrait encore à moins bon marché.

Reste à savoir si le gouvernement de juillet a réellement augmenté notre dette d’un capital de 760 millions.

En examinant de près comment M. Garnier-Pagès compose les 5 milliards 179 millions qui, selon lui, constituaient la dette publique au 1er janvier 1848, on ne tarde pas à découvrir quelques erreurs et certains oublis qui proviennent sans doute, comme le fait observer M. Lacave-Laplagne, de l’extrême précipitation avec laquelle le rapport du 9 mars paraît avoir été rédigé.

Ainsi, par exemple, M. Garnier-Pages, probablement sans s’en apercevoir, comprend, dans la dette publique au 1er janvier 1848, la totalité de l’emprunt du 10 novembre, comme si ces 250 millions pouvaient être mis à la charge de l’ancien gouvernement, lui qui ne les a ni dépensés ni même reçus. A la vérité, les adjudicataires de l’emprunt avaient, avant le 24 février, versé 82 millions ; mais ces 82 millions étaient dans le trésor, ils faisaient partie de l’encaisse ; c’est le gouvernement actuel qui en a réglé l’emploi, et c’est uniquement à son compte qu’ils peuvent être portés. Voilà donc, personne ne le contestera, 250 millions qui doivent disparaître du bilan que nous dressons. Au lieu de 670 millions, nous ne sommes plus qu’à 510.

Ce n’est pas tout : l’encaisse du trésor ne se composait pas seulement de ces 82 millions versés à compte sur l’emprunt, et que nous écartons, puisque l’emprunt lui-même doit être laissé de côté : il s’élevait à un total de 190 millions ; restent donc 108 millions qui ne peuvent passer inaperçus. De deux choses l’une : ou supprimez 108 millions sur la dette flottante que cet encaisse était destiné à réduire jusqu’à due concurrence, ou portez les 108 millions au crédit de l’ancien gouvernement. Dans les deux cas, le résultat est le même. Nous voilà donc descendus de 510 millions à 402.

Maintenant, n’est-il pas juste, quand on procède à une liquidation, de tenir compte des créances actives qui restent à recouvrer ? Ne parlons pas, si l’on veut, des créances diplomatiques, des répétitions à exercer sur la Belgique, sur la Grèce ; ne parlons pas non plus des créances litigieuses qui figurent à l’actif du trésor ; mais